Les Jeunes
Beaucoup de jeunes assassins
Couvant le meurtre dans leurs seins,
Charment de leur front taciturne
Le ciel nocturne.
Ils se traînent le long d'un mur.
La lune qui luit dans l'azur
Argente, plus verte que l'herbe,
Leur joue imberbe.
Ici Polyte encore enfant,
A l'air candide et triomphant,
Terrasse une vieille et la vole,
Et puis s'envole.
Plus loin, c'est le petit Loulou
Déjà meurtrier et filou,
Qui, rose avec un oeil qui brille,
Semble une fille.
Chérubin triste au poil naissant,
Il se jette sur un passant
Dont l'habit cossu le renseigne,
Et vous le saigne.
Et puis, dans un bouge rieur
Du boulevard extérieur
Il s'en va, pâle encor du drame,
Trouver sa femme.
Joyeux, il la saisit aux flancs
Avec ses doigts encor sanglants,
Et baise sa joue éraillée
Et maquillée.
Et tous les deux, le front pesant,
Ils boivent, en s'entre-baisant,
Une eau-de-vie épouvantable
Qui les accable.
Et Loulou murmure tout bas:
Cache cet or dans ton vieux bas.
J'ai fait une bonne rencontre;
Tiens, vois la montre!
J'ai mes dix-sept ans révolus:
Donc l'atelier, il n'en faut plus.
Assez de travail et de jeûnes.
Quoi! place aux jeunes!