DÉJÀ
Hé quoi ?... Déjà ?... Amour léger comme tu passes !
À peine avons-nous eu le temps de les croiser
Que mutuellement nos mains se désenlacent.
Je songe à la bonté que n’a plus le baiser.
Un jour partira donc ta main apprivoisée !
Tes yeux ne seront plus les yeux dont on s’approche.
D’autres auront ton cœur et ta tête posée.
Je ne serai plus là pour t’en faire un reproche.
Quoi ? sans moi, quelque part, ton front continuera !
Ton geste volera, ton rire aura sonné,
Le mal et les chagrins renaîtront sous tes pas ;
Je ne serai plus là pour te le pardonner.
Serait-il donc possible au jour qui nous éclaire,
À la nuit qui nous berce, à l’aube qui nous rit,
De me continuer l’aumône éphémère,
Sans que tu sois du jour, de l’aube et de la nuit ?
Sera-t-il donc possible, hélas, qu’on te ravisse,
Chaleur de mon repos qui ne me vient que d’elle !
Tandis que, loin de moi, son sang avec délice
Continuera son bruit à sa tempe fidèle.
La voilà donc finie alors la course folle ?
Et tu n’appuieras plus jamais, sur ma poitrine,
Ton front inconsolé à mon cœur qui console,
Rosine, ma Rosine, ah ! Rosine, Rosine !
Voici venir, rampant vers moi comme une mer,
Le silence, le grand silence sans pardon.
Il a gagné mon seuil, il va gagner ma chair.
D’un cœur inanimé, hélas, que fera-t-on ?
Et bien, respire ailleurs, visage évanoui !
J’accepte. À ce signal séparons-nous ensemble...
Me voici seul ; l’hiver là... c’est bien... Nuit.
Froid. Solitude... Amour léger comme tu trembles !
La Porte de plâtre