Et je repris, montrant à l'enfant adoré
L'obscur feu du pasteur et l'étoile sacrée:
De ces deux feux, perçant le soir qui s'assombrit
L'un révèle un soleil, l'autre annonce un esprit,
C'est l'infini que notre oeil sonde;
Mesurons tout à Dieu, qui seul crée et conçoit!
C'est l'astre qui le prouve et l'esprit qui le voit;
Une âme est plus grande qu'un monde.
Enfant, ce feu de pâtre à une âme mêlé,
Et cet astre, splendeur du plafond constellé
Que l'éclair et la foudre gardent,
Ces deux phares du gouffre où l'être flotte et fuit,
Ces deux clartés du deuil, ces deux yeux de la nuit,
Dans l'immensité se regardent.
Ils se connaissent; l'astre envoie au feu des bois
Toute l'énormité de l'abîme à la fois,
Les baisers de l'azur superbe,
Et l'éblouissement des visions d'Endor;
Et le doux feu de pâtre envoie à l'astre d'or
Le frémissement du brin d'herbe.
Le feu de pâtre dit: La mère pleure, hélas!
L'enfant a froid, le père à faim, l'aïeul est las;
Tout est noir; la montée est rude;
Le pas tremble, éclairé par un tremblant flambeau;
L'homme au berceau chancelle et trébuche au tombeau.
L'étoile répond: Certitude!
De chacun d'eux s'envole un rayon fraternel,
L'un plein d'humanité, l'autre rempli de ciel;
Dieu les prend, et joint leur lumière,
Et sa main, sous qui l'âme, aigle de flamme, éclôt,
Fait du rayon d'en bas et du rayon d'en haut
Les deux ailes de la prière.
Ingouville, août 1839.