PLUME DE POÉSIES
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 Victor HUGO (1802-1885) Après La paque

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Inaya
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Inaya


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Victor HUGO (1802-1885) Après La paque Empty
MessageSujet: Victor HUGO (1802-1885) Après La paque   Victor HUGO (1802-1885) Après La paque Icon_minitimeJeu 29 Sep - 22:27

APRES LA PAQUE

On était aux grands jours où le temple flamboie,
Où les petits enfants s'éveillent pleins de joie;
La Pâque était venue. On avait dans les fours
Cuit le pain sans levain qu'on vend aux carrefours.

Or Jésus-Christ était sur la montagne obscure;
Au lieu même où plus tard fut un temple à Mercure
Bâti par Adrien, détruit par Constantin.

C'était le soir; Jésus avait dit le matin
Aux disciples rangés autour de lui : « - Vous, Jacques,
« Vous, Pierre, vous, Thomas, voici le jour de Pâques;
« Vous irez dans la ville où des gens passeront;
« Vous trouverez un homme ayant sa cruche au front;
« À l'endroit où cet homme ira, quel qu'il puisse être,
« Vous irez à sa suite, et vous direz : - Le Maître
« Vient faire ici la Pâque. - Et pour cette raison
« Le maître du logis donnera sa maison.
« Il sied que Dieu toujours nous mène où bon lui semble.
« Et nous célébrerons la Pâque tous ensemble.

Et cela s'était fait ainsi qu'il l'avait dit.

Ce que la Cène vit et ce qu'elle entendit
Est écrit, dans le livre où pas un mot ne change,
Par les quatre hommes purs près de qui l'on voit l'ange,
Le lion, et le boeuf, et l'aigle, et le ciel bleu;
Cette histoire par eux semble ajoutée à Dieu
Comme s'ils écrivaient en marge de l'abîme;
Tout leur livre ressemble au rayon d'une cime;
Chaque page y frémit sous le frisson sacré;
Et c'est pourquoi la terre a dit : Je le lirai!
Les âmes du côté de ce livre mendient,
Et vingt siècles penchés dans l'ombre l'étudient.

C'était donc le soir même où cet être divin
Venait de partager le gâteau sans levain;
Christ, assis, lui treizième, au centre de la table,
- Et ce noir chiffre Treize est resté redoutable, -
Avait rompu le pain, versé le vin, disant :
« Mangez, voici ma chair; buvez, voici mon sang. »
Puis il avait repris : « Allons où Dieu nous mène! »
Et tous étaient allés en sortant de la Cène
Au jardin qui fleurit derrière le Cédron.

Ce torrent, que jamais n'a touché l'aviron,
Coulait hors de la ville au pied d'une colline.
Les pâtres y montraient la cave sibylline
De Lilith, femme spectre, amante du démon;
C'est près de ce coteau que le prêtre Simon
Fit creuser le canal à laver les hosties;
Des sources y versaient, à travers les orties,
Une eau qui de la ville emplissait les viviers;
Et ce lieu s'appelait le Mont des Oliviers.

On venait sur ce mont aux époques de jeûnes.

Une plantation d'oliviers alors jeunes
Le couvrait en effet, jetant aux verts sentiers
Une ombre qui faisait durer les églantiers.
Christ y vint, murmurant tout bas : Que Dieu m'assiste!
Et ce qui s'y passa ce soir-là fut si triste,
Si lâche et si fatal qu'aujourd'hui ce jardin
Est voisin de l'enfer comme du ciel l'Eden.

Voici ce que Jésus disait sur la montagne;

« Ce qu'on perd sur la terre au ciel on le regagne.

« Qui regarde en arrière et s'étonne de peu,
« Celui-là n'est pas propre au royaume de Dieu.

« Dieu se dévoile assez pour que l'homme le voie.

« Je suis moins grand que lui, mais c'est lui qui m'envoie.
« Quand je parle, c'est lui qui dit ce que je dis.
« Si vous vous aimez bien, voilà le paradis.

« Soyez bons. Dieu choisit ceux que je lui désigne.

« Il est le vigneron, et moi je suis la vigne.
« Il viendra, comme il fit pour Job et pour Amos,
« Une serpe à la main, émonder mes rameaux,
« Et, gardant les féconds, coupera les stériles.

« Enseignez tendrement le peuple dans les villes,
« Souriez, n'ayez point entre vous de débats.

« Quand vous êtes parmi les tombes, parlez bas;
« Car au fond du sépulcre une oreille est ouverte;
« Ceux qu'on croit endormis sous la grande herbe verte,
« Ecoutent, et vos voix leur parlent dans les vents,
« Et sachez que c'est là la maison des vivants.

« Qui maudit doit trembler. Ne faites rien trop vite.
« Esdras, voyant l'enfant d'une femme maudite,
« Le prit et le jeta tout vivant dans la mer
« Par l'effet surprenant d'un zèle trop amer.
« Dieu l'a puni.

Marchez dans la route tracée.
« Aimez. N'enviez pas à d'autres leur pensée;
« Il faut se contenter des lumières qu'on a;
« L'un est plus sage et l'autre est plus doux; Dieu donna
« Plus de fruit au figuier, plus d'ombre au sycomore.
« Croyez. »

Il ajouta d'autres choses encore;
Puis soudain il dit, pâle et d'un frisson saisi :

- Allons! celui qui doit me vendre est près d'ici.
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Victor HUGO (1802-1885) Après La paque
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