Toujours l'esprit avance et l'art se' renouvelle:
Pour refaire sans cesse avec de la clarté
Une dot de chéfs-d'oeuvre à l'homme épouvanté,
Les grànds hommes sont là Comme de grands prodigues.
Nous 'avons beau forger des lois, creuser des digues,
Le génie engloutit tout ce que nous faisons
Sous' un splendide amas d'immenses floraisons:
Rien n'arrête le pas du genre humain; il marche;
II fait Rome après Thèbe et le dôme après l'arche;
Il fait le Colisée après le Parthénon.
Homère meurt, laissant comme un astre son nom,
Eschyle suit; la France éclôt quand Rome expire;
Puis Rabelais surgit, Cervantes naît, Shakspeare
Luit, et ces hommes sont comme des océans.
Le colosse qui vient fait' peur aux vieux géants;
Dante épouvante Amos; Michel-Ange intimide,
Rien qu'en dressant le front,. la grande, Pyramide,
Et, de l'Apollon grec au Sphinx, égyptien,
Fait devant l'art nouveau frissonner l'art ancien"
Homère, sous le poids du destin sombre, expire;
Virgile dit: Heureux qui sait la fin! Shakspeare
Crie: Etre ou n'être pas; telle est la question.
Eschyle, dont le vers fait une fonction,
Pindare,, front battu du sombre essaim de l'ode,
. David, Ezéchiel, Stésichore, Hésiode,
Bruissent comme au vent de ténébreux rameaux;
Idithun, Salomon, Jean, Isaïe, Amos,.
Les paumes de leurs mains sur les, pages. des. Bibles,
Vont comme enveloppés de:tourbillons terribles.;
L'éclair emporte Dante et la brume Ossian;
Et l'esprit humain tremble ainsi qu'un océan
Quand ces problèmes noirs qui soufflent les délires
Déchaînent dans sa nuit la tempête des -lyres