Oui, le Génie a ses athées.
Devant l'envie à l'oeil hagard
Les grandes âmes insultées
Baissent leur pudique regard.
L'envieux s'accouple à l'impie,
L'âme bassement accroupie,
Tous deux se tiennent par la main,
Mentant, et de leur 'lèvre impure
Niant Dieu, l'un dans la nature,
L'autre dans le génie humain!
Mais la justice sort des choses;
Ils souffrent, ils sont malheureux;
Ils cachent sous leurs fronts moroses
Un ennui louche et ténébreux.
L'éternelle équité qui juge
Quiconque a l'ombre pour refuge,
L'erreur pour but, le mal pour voeu,
Condamne à la tristesse noire
Ceux qui font douter de la gloire
Et ceux qui font douter de Dieu.
XXXII
C'est une loi: Veuillot existe, ce maroufle;
Planche est réel, Barbet 10° respire, Nisard souffle;
Rolle vit; Fréron mord Voltaire, on ne sait qui
Pique Milton; Cecco, qu'on nomme aussi Cecchi,
Met sur Dante indigné sa patte familière;
Green rampe sur Shakspeare et Visé sur Molière;
Les grands hommes qu'au fond de l'azur nous voyons
Passer sous leur couronne immense de rayons,
Splendides, par la mort faits plus vivants encore,
A jamais envolés dans la superbe aurore
Et pour l'éternité. dé la gloire partis,
Sont rongés et couverts d'infiniment petits;
Doric l'éblouissement n'exclut, pas la ,vermine;
La gloire a son insecte et l'acarus la mine;
L'Océan sent la pieuvre errer dans son flot bleu.;
Zoïle est sur Homère et Satan èst sur Dieu;
Le sublime n'est pas dispensé de l'immonde;
Et je ne serais pas surpris le moins du monde
Quand un ange viendrait nous révéler à tous
Que dans le ciel profond les astres ont des poux.
Paris, 20 septembre 1874.