Tu vols un homme ayant un projet sous les cieux,
Mes voeux n'ont plus de frein, je suis ambitieux,
J'ai résolu d'avoir un dimanche superbe,
Et mon plan, c'est d'aller nous étendre sur l'herbe.
Je couve ce dessein, je fais cet opéra.
Et nous serons autant de couples qu'on voudra.
Nous chercherons un lieu désert, une chapelle,
Un burg ne sachant plus le nom dont il s'appelle,
N'ayant plus pour baron que le merle siffleur,
Qui soit tout en ruine et qui soit tout en fleur,
D'affreux murs, noirs dans l'ombre, absolument farouches;
Là les bouches auront des bontés pour les bouches;
C'est mon programme. Il est un arbuste gourmand
Dont la feuille est d'un tour si frais et si charmant
Qu'on en faisait jadis une couronne aux verres;
Il orne les vieux murs d'alcôves peu sévères;
C'est par lui qu'un logis qui s'écroule est complet;
Belle, ce tapissier des masures me plaît.
Viens, nous serons heureux, et pour auxiliaires,
Ô belle, nous aurons les dieux, les chants, les lierres.
Le mois de mai fera son devoir; Dieu clément
Le veut; on entendra chuchoter vaguement
Des profondeurs d'oiseaux sous des épaisseurs d'arbres;
On se parlera bas; les seins seront des marbres,
Non les coeurs; on aura quelque ami pour témoin,
Sans empêcher pourtant qu'il aille un peu plus loin.
26 mai.