ANDRÉ
Je te jure un amour-éternel!
LISE, souriant.
Calme-toi!
Parlons net. Et soyons fripons de bonne foi.
ANDRÉ
Lise!
LISE, caressante.
Dispense-toi, cher amant, de poursuivre.
André, pour de l'or faux je donne du vrai cuivre;
Des serments d'un menteur mon coeur est peu friand;
Je suis franchement fourbe, et je paye en riant
Tes écoute-s'il-pleut, d'un va-t'en-voir-s'ils-viennent.
Fous qui font des serments et niais qui les tiennent!
Tu me feras des traits et je te les rendrai.
André brûle pour Lise et Lise adore André,
Mais Lise berne André comme André trompe Lise.
Amour est notre autel, Caprice est notre église;
On se suit aujourd'hui pour se quitter demain;
D'ailleurs, être autrement, c'est n'avoir rien d'humain;
La passion finit par une pirouette;
Homme veut dire vent et femme girouette.
Aimons-nous, puisque c'est la meilleure façon
D'unir ta perfidie avec ma trahison,
Mais ne nous gênons point et ne soyons point dupes.
Pas de glu sur ta plume et de plomb à mes jupes.
André, soyons heureux; de plus soyons joyeux.
Quel bête de bandeau l'Amour a sur les yeux!
Otons-le-lui, veux-tu? Voyons clair dàns nos âmes.
Il faut pour faire un feu toutes sortes de flammes,
Et pour faire un destin toutes sortes d'amours.
Les coeurs toujours constants sont aveugles et sourds.
L'oeil qui n'a plus d'éclair, l'esprit qui n'a plus d'aile,
Meurt, et c'est être infirme enfin qu'être fidèle.
Gaîment on se retrouve après qu'on se perdit.
Hein? Soyons bonne femme et bon homme. Est-ce dit?
La douce main d'amour n'est point une tenaille.
Aimons-nous. Trompons-nous.
ANDRÉ
J'y consens.
LISE, furieuse.
Ah! canaille!