PREMIÈRE REFLEXION
Pas de religion qui ne blasphème un peu.
L'une en croquemitaine habille le bon Dieu;
Il fait son paradis du hurlement des âmes;
Sa cave à son plafond jette un reflet de flammes,
Il grince, et son bonheur est d'avoir un enfer
A remuer avec une fourche de fer.
L'autre à la main lui plante un grand sabre, et l'affuble
D'un uniforme, mal caché par sa chasuble;
Il a l'obus en bas et la foudre là-haut;
Il était Jehovah, le voilà Sabaoth;
On le fait tambour-maître et général d'armée;
Il va-t-en guerre. Étant riche en noir de fumée,
Belzébuth jusqu'à Dieu se glisse, et cet escroc
Lui charbonne en riant deux moustaches en croc;
Le Père-Éternel sent vaguement qu'on le berne,
Se laisse faire, met l'éclair dans sa giberne,
Se voit destitué par le pape, permet
Que la bataille accroche à sa mitre un plumet,
Ferme les yeux sur l'homme, être irrémédiable,
Et, n'étant plus bon Dieu, tâche d'être bon diable.