C’est ce qui m’a tué!
Bénoni Borel.
Il dort, mon Bénoni, bien moins souffrant sans doute,
C’est le premier sommeil qu’aussi longtemps il goûte;
Il dort depuis hier que, le regard terni,
Dans sa débile main il a serré la mienne,
Disant: Vous m’aimez tous! maintenant qu’elle vienne!
Il dort, mon Bénoni!
Il dort, mon Bénoni! viens le voir, il repose;
Marche bien doucement, car le bruit l’indispose.
Viens le voir au salon d’où chacun s’est banni;
Parlons bas, parlons bas, s’il allait nous entendre,
S’éveiller pour souffrir, son sommeil est si tendre!
Il dort, mon Bénoni!
Il dort, mon Bénoni! de ta main inquiète
Relève ces rideaux; oh! regarde sa tête,
Vois ses grands yeux fermés, son front moins rembruni,
Le calme de ses traits; tiens, le vois-tu sourire?
Un doux rêve l’occupe, écoutons: il soupire
Il dort, mon Bénoni!
Il dort, mon Bénoni! quoi! méchant, tu l’appelles?
Laisse-le dans sa paix; tu trembles, tu chancelles,
Tu l’embrasses, tu prends son bras qui m’a béni!
Ne le réveille pas D’où naissent tes alarmes?
Je vais pleurer aussi, si tu verses des larmes?
Il dort, mon Bénoni!
- Il dort, ton Bénoni! Douce erreur que j’envie!
Pauvre enfant! ignorant le secret de la vie,
Son jour mélancolique avant l’heure a fini;
Son Âme avait brisé son corps par la pensée,
Et sans être comprise aux cieux clic est passée!
Il dort, ton Bénoni!