A LA BRISE
Haleine du printemps, ô brise parfumée,
Errant de fleur en fleur, de vallon en vallon!
L'amoureux, pour ouïr ta roulade animée,
S'arrache sans regret aux plaisirs du salon.
Il place sur ton aile, aimable messagère,
Ses longs soupirs d'amour, ses rêves de bonheur,
Et tu vas les porter à l'amante sincère
Qui, là-bas, les reçoit dans les plis de son coeur.
Que de fois le poète a redit sur sa lyre
Les gracieux accords qui vibraient dans ta voix,
Et que de fois l'oiseau dans un joyeux délire
S'est mis à les chanter sous les arceaux des bois!
O brise enivre-moi longtemps de ton arôme!
Viens rafraîchir mon âme où germe la douleur!
Passe devant mes yeux comme un léger fantôme,
Et porte jusqu'à Dieu l'écho de mon malheur!
Mai 1882.