ai revu l'ancienne phalange
Vierge de rênes et de bâts
Qui fit mordre à main sot la fange
Dans la grand' plaine des Débats.
Je lamentais vos funérailles
Et soudain, à vivre entêtés,
Vous faisiez sonner les mitrailles
De vos verbes ressuscités.
Et j'ai dit: « Bravo, l'heure est bonne
Pour le geste et les beaux exploits :
Céans la paresse est félonne,
Faites oeuvre de vos dix doigts.
« Taillez en lance votre plume
Pour découdre le laid, le faux,
Et qu'à votre mèche s'allume
L'étincelle de jours nouveaux.
« D'une parole franche et fruste
Clouez le mal à son écrou;
Pour aider le règne du juste
Matez le règne du gros sou.
« Dans les vieux mots, outre vidée,
Mettez le sens neuf et profond;
Soufflez l'amour, gonflez l'idée,
Bulle où les avenirs se font.
« Que la prudence soit honnie;
Chargez d'un vigoureux: « Taïhaut! »
La bêtise, la vilenie,
Qu'elle soit d'en bas ou d'en haut.
Barbouillez de votre écritoire
Les Homais qui, d'un front hardi,
Au crétinisme dans l'histoire
Ajoutent un tome inédit.
Bonheur! au lieu de la fadaise
De nos feuilles à gros succès,
Nous entendrons l'âme française
Parler ferme, et parler français.
Et nous aurons la chance insigne
De voir, au moins tous les sept jours,
La Beauté sans feuille de vigne
Et la Vérité sans atours.
Allez! si votre nouveau thème
Scandalise un cerveau transi,
Si quelque sot hurle: « Anathème! »
L'esprit humain dira: « Merci ! »