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 Tristan Derème. (1889-1941) CLI

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James
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James


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Tristan Derème. (1889-1941) CLI Empty
MessageSujet: Tristan Derème. (1889-1941) CLI   Tristan Derème. (1889-1941) CLI Icon_minitimeMar 2 Oct - 10:11

CLI

Une pie noire et blanche en se posant sur un platane

A fait dégringoler un flot de feuilles jaunes.
C'est l'automne. Bourre de roses ta guitare
Et médite en silence aux dernières nuits chaudes
Sur tes lauriers en fleurs qu'a brûlés le tonnerre,

Et dans l'air tendre aux feuilles crois entendre

Ces soupirs qu'éclaira par un autre septembre

La topaze lunaire.


Des mots. Des mots. Pourtant ta douleur est si simple...
Pourquoi ne pas pleurer comme un pauvre jeune homme?

Mais non; chaque lanière qui te cingle

Te fait jaillir du coeur une harangue trop sonore;
Et lyrique et debout dans les ruines et les roches
Et défiant le sort, les étoiles et la nature,
Tu peuples de discours ta malheureuse solitude

Et tu gardes tes pleurs pour verser des paroles.


Tu déclames; tu crois jouer un vaste rôle;
Mais qu'une feuille tombe au bois qui t'environne;

Que tu triomphes d'une robe;

Que trop lourde de sucre et prise à la rafale

Une abeille froisse son aile;
Qu'aux verts bambous de la tonnelle

Un liseron se dénoue et se fane;
Que les lilas noircissent sous la neige;
Qu'un chien se noie au tumulte des gaves

Et que meure une ardeur que tu crus étenelle :

Ce sont toutes choses égales.


Les bleus martins-pêcheurs égratignaient le fleuve calme;
Tu sommeillais sous les noyers dont l'ombre est fraîche et noire

Et tu rêvais, loin du faux musc et du vacarme

De la ville où régnaient la Matchiche et la Tonkinoise

Et cette blanche ballerine

Qui dansait nue avec un ara bleu sur la poitrine;

Sous les feuillages qui chantaient au vent d'automne,
Malgré ton désespoir dans l'herbe de la rive

Tu n'avais pas ce coeur qui se lamente et qui s'étonne

Et tu savais encor, sous tes larmes, sourire.


Laisse tomber les feuilles jaunes des platanes

Et tes espoirs pareils à des fusées

Qui montaient en brûlant au-dessus des plaines natale;

Demain il y aura de nouvelles rosées,

Des feuillages nouveaux et des lèvres persuasives

Et des amours que déjà tu désires

Éclatant sur tes jours comme l'orage et les tonnerres,
Des tendresses que berce en caresse l'azur des îles,

Et de plus en plus éternelles.

_________________
J'adore les longs silences, je m'entends rêver...  
James
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