POESIES POSTH. UN CRI
Hirondelle ! Hirondelle ! Hirondelle !
Est-il au monde un coeur fidèle ?
Ah ! S' il en est un, dis-le moi,
j' irai le chercher avec toi.
Sous le soleil ou le nuage,
guidée à ton vol qui fend l' air,
je te suivrai dans le voyage
rapide et haut comme l' éclair.
Hirondelle ! Hirondelle ! Hirondelle !
Est-il au monde un coeur fidèle ?
Ah ! S' il en est un, dis-le moi !
J' irai le chercher avec toi.
Tu sais qu' aux fleurs de ma fenêtre
ton nid chante depuis trois ans,
et quand tu viens le reconnaître
mes droits ne te sont pas pesants.
Hirondelle ! Hirondelle ! Hirondelle !
Est-il au monde un coeur fidèle ?
Ah ! S' il en est un, dis-le moi !
J' irai le chercher avec toi.
Je ne rappelle rien, j' aspire
comme un des tiens dans la langueur,
dont la solitude soupire
et demande un coeur pour un coeur.
Hirondelle ! Hirondelle ! Hirondelle !
Est-il au monde un coeur fidèle ?
Ah ! S' il en est un, dis-le moi !
J' irai le chercher avec toi.
Allons vers l' idole rêvée,
au nord, au sud, à l' orient :
du bonheur de l' avoir trouvée
je veux mourir en souriant.
Hirondelle ! Hirondelle ! Hirondelle !
Est-il au monde un coeur fidèle ?
Ah ! S' il en est un, dis-le moi !
J' irai le chercher avec toi !
POESIES POSTH. LA FEUILLE VOLEE
Va-t-il écrire à sa maîtresse,
l' oiseau vainqueur, le moineau franc,
sur ce larcin que son bec presse,
sur ce lambeau de vélin blanc ?
Il me l' a pris. J' allais moi-même,
trempé de pardon et d' espoir,
l' envoyer à l' absent que j' aime,
et l' appeler... s' il veut me voir.
Souffle hardi qui viens de naître
parmi les souffles de l' été,
je t' avais ouvert ma fenêtre,
et tu voles ma pauvreté !
Oiseau, le fragment d' une page
peut contenir tant de bonheur !
Ah ! Si tu le sais, sois mon page,
et ne t' en va pas sans mon coeur.
Ce coeur, souvent, révèle à peine
le trouble enfermé de mon sort :
ma voix ardente est sans haleine,
mon âme en pleurs est sans essor.
Et tes ailes me font envie
quand ta volonté frappe l' air.
Ton cri rapide est une vie !
Ton vol, un innocent éclair !
ô flèche amoureuse lancée,
aussi prompte que ton désir,
l' objet de ta fuite empressée,
dieu ! Que tu dois bien le saisir !
Toi, chez qui le printemps allume
l' audace et l' élan de l' amour,
remets ce papier sous ma plume
puisqu' il va promettre un beau jour.
Mais tu t' enfuis, charmante chose,
en me regardant de travers ;
car tu hais la cellule close,
toi dont la cage est l' univers !