ELEGIES ELEGIE MA SOEUR,
Ma soeur, il est parti ! Ma soeur il m' abandonne !
Je sais qu' il m' abandonne, et j' attends, et je meurs,
Je meurs. Embrasse-moi, pleure pour moi... pardonne...
Je n' ai pas une larme, et j' ai besoin de pleurs.
Tu gémis ! Que je t' aime ! Oh ! Jamais le sourire
Ne te rendit plus belle aux plus beaux de nos jours.
Tourne vers moi les yeux, si tu plains mon délire ;
Si tes yeux ont des pleurs, regarde-moi toujours ;
Mais retiens tes sanglots. Il m' appelle, il me touche,
Son souffle en me cherchant vient d' effleurer ma bouche.
Laisse, tandis qu' il brûle et passe autour de nous,
Laisse-moi reposer mon front sur tes genoux.
Écoute ! Ici, ce soir, à moi-même cachée,
Je ne sais quelle force attirait mon ennui :
Ce n' était plus son ombre à mes pas attachée,
Oh ! Ma soeur, c' était lui...
Il parlait, et ma vie était près de s' éteindre.
L' étonnement, l' effroi, ce doux effroi du coeur,
M' enchaînait devant lui. Je l' écoutais se plaindre,
Et, mourante pour lui, je plaignais mon vainqueur...
Hélas ! Qu' avait-il fait alors pour me déplaire ?
Il gémissait, me cherchait comme toi.
Non, je n' avais plus de colère,
Il n' était plus coupable, il était devant moi.
Sais-tu ce qu' il m' a dit ? Des reproches... des larmes...
Il sait pleurer, ma soeur !
Ô dieu ! Que sur son front la tristesse a de charmes !
Que j' aimais de ses yeux la brûlante douceur !
Sa plainte m' accusait ; le crime... je l' ignore :
J' ai fait pour l' expliquer des efforts superflus.
Ces mots seuls m' ont frappée, il me les crie encore :
" Je ne te verrai plus ! "
Et je l' ai laissé fuir, et ma langue glacée
A murmuré son nom qu' il n' a pas entendu ;
Et sans saisir sa main ma main s' est avancée,
Et mon dernier adieu dans les airs s' est perdu.