PLUME DE POÉSIES
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 Robert Desnos. (1900-1945) Calixto. (Septembre 1943)

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MessageSujet: Robert Desnos. (1900-1945) Calixto. (Septembre 1943)   Robert Desnos. (1900-1945) Calixto. (Septembre 1943) - Page 2 Icon_minitimeMar 30 Oct - 11:13

Rappel du premier message :

Calixto. (Septembre 1943)

À S’ENDORMIR À LA LÉGÈRE,
AU BRUIT DES SOURCES, SOUS LE CIEL,
RÊVANT AU RYTHME PLANÉTAIRE,
ON PLONGE, GISANT, DANS LA TERRE
ET SI JAMAIS RÊVE AU RÉEL
RÉVÉLA SECRET OU MYSTÈRE
C’EST EN DORMANT AU BRUIT DBS EAUX
ET DU VENT FERMANT SES CISEAUX.

À S’ENDORMIR À LA LÉGÈRE,
SUR LA TERRE, DANS QUEL FOUILLIS,
TERRIENS, SOMBREZ-VOUS? LA FOUGÈRE
S’ÉCROULE EN PANIERS DE LINGÈRE
DANS UNE ARMOIRE DE TAILLIS
BRODÉS DE SOIE OÙ S’EXAGÈRE
LA LUMIÈRE, HORS DU MANTEAU,
DE TA CHAIR, NYMPHE CALIXTO.



Hors du manteau, la lumière
De ta chair, nymphe Calixto,
En pleine étoile se libère
Du clair de jour et nous éclaire
Tard ou, suivant la saison, tôt.
Mais qu’importe si l’on préfère,
Jailli du manteau de ta chair,
Ton coeur lui-même sombre et clair.

Que l’éclair sombre sur les rives
Où ta chair décline un couchant
Érotique au ciel où s’inscrivent
Nord, Sud, Est, Ouest et leurs dérives
Et les ourses qui dans ce champ
Vont brouter des herbes cursives,
Aurores, nuages, lueurs
Et boire aux rêves les sueurs.

C’est l’heure où les robes s’écroulent,
Où les cuisses, le ventre rond,
Un sourire sous la cagoule,
Les hanches, la croupe qui roule
Vigne promise au vigneron,
Au bain de la nuit qui s’écoule
S’abandonnent dans les baisers
Et s’irritent pour s’apaiser.

Avec des femmes que j’ignore,
Ô mes amis d’Outre-Océan,
Sous un plafond de météores
Vous déterrez la mandragore.
Je suis toujours du même clan,
Je guette au même sémaphore,
Nymphe prétexte, Calixto,
Le prochain signal de morte-eau.

Que ton chariot, avec ses roues,
Ne puisse franchir l’horizon,
Ou qu’Artémis, le vent en proue,
Te rencontre en ourse garoue
Et t’ajoute à ses venaisons,
Que ton sang colore la boue
Avec celui, ô libation,
Du fruit de ta parturition

Au ciel des couches solitaires
Enfantant des rêves de feu
Ou de glace ou sentant la terre.
Sur les étreintes adultères,
Sur l’équivoque et sur le jeu
Dessinant ton quadrilatère,
Tu es froide comme le Nord,
Nymphe en peine, vaisseau sans port.

Depuis longtemps tu fais la bête
Mais la belle est sous le manteau,
Ainsi dans le poisson l’arête,
Ainsi sous ta chair le squelette
Sur quoi se brise le couteau,
Ainsi la pensée en ta tête,
Le souvenir, le voeu, l’espoir
La lumière pour mieux voir.

Et de même sous le langage
Se dissimulent maints secrets.
La toute belle en ses bagages
Cache l’étoile aux bons présages
Et le prisonnier aux aguets,
Rêve de belle et de voyages
Comme aux jours de la nef Argo
Dont les marins parlaient argot.

Au rif sans qui les châsses
N’auraient plus que dalle à bigler
Et seraient creuses comme un glasse
Lorsque le siffleur en a clâsse,
Au rif d’abord, la bonne clé
Ouvrant les lourdes pour la câsse,
Au rif d’abord, donnons condé
Pour crônir ceux qui sont ladé.

À la tardé, dans le silence,
Amis, pallas d’esgourder
À la source, bonir la lance.
À la tardé, pourtant méfiance
Car elle peut tout inonder
Tout estourbir dans sa violence.
Ah! Que la lance à la tardé
Maccabe ceux qui sont ladé.

Pour escoffier ces yeux de bronze,
Que l’air se frime en pur cambouis
Avant prennent le train onze.
Et qu’il les sale et les déronce,
Les entubant ribouis,
Jusqu’au battant, engonces!
Qu’il soit bléchard et débridé
Pour pourrir ceux qui sont ladé.

Quant au bouzin, quant à la crotte
Qui pavoise et fait son persil,
Lorsque la moulana bagotte
À fond de baba sur les mottes,
Que son bide en soit bien farci,
Et que jamais ils déhottent.
Qu’elle soit un Bagneux fadé
Pour saper ceux qui sont ladé!

La grande borgne est loucedoque!
C’est encor marre pour leur blot
Lorsque, mettant les loucepoques,
Ils chialeront la lousseroque
De les assister au pajot
Tant ils auront la loussefroque
De voir les largues en pétard
À labactem les passer dar.

Notre sorgue à nous sera douce,
Toute au béguin, toute aux bécots.
Sans gaffer rien, même la rousse,
Nous pioncerons plus pouce.
Même n’ayant monaco
Nous le piccolerons sans frousse
Tandis que les vers de sapin
Leur boufferont châsses et tarin.

Mais plus vif que rif, air, bouzin, lance
Feront les pognes des butteurs
Pour liquider la connivence
Et le sapement en instance.
C’est le boniment des lutteurs
Le cri des piafs, le jour de danse
Le coup de bambou au château,
C’est du billard, c’est du gâteau.

Mais toi Calixto la grande ourse
N’aurais-tu pas largué ton bled?
Icicaille à tes grandes ourses,
Le raisiné cascade à sources
Rien n’est plus droit, tout est en Z.
Comme des faisans à la Bourse,
Les demi-sels se croient des mecs.
Mektoub! un jour ils l’auront sec.

Car le trèpe est toujours le trèpe,
Il la boucle et prend ses biftons
Pour régler leur compte à ces crèpes,
Visant leur mesure de crêpe
Pour le jour de la Saint-Bâton.
Elle n’est pas folle la guêpe
Qui, dans la noye, ô Calixto
Entrave ce jour pour bientôt.

Les clignotantes dans la sorgue
En attendant font leur tapin,
Le bourguignon fait ronfler l’orgue
Pendant que se bourre la morgue,
Le piaf des bois gouale aux lapins
Et le piscaille à pleines forgues
Ripe en fusant dans les coinstos
Où le flot frise et fait château.
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MessageSujet: Re: Robert Desnos. (1900-1945) Calixto. (Septembre 1943)   Robert Desnos. (1900-1945) Calixto. (Septembre 1943) - Page 2 Icon_minitimeMar 30 Oct - 11:15

On dit grand mystère, à minuit, près d’une source
Un jeune homme de pleines vertus
Va dévêtir une jeune fille dont la grâce et la pudeur égalent l’ardeur de
volupté ;
On dit qu’un couple, au matin, sera réveillé
Par l’odeur de la forêt et le chant des oiseaux ;
On dit qu’ils vivront longuement une inaltérable jeunesse.

On dit qu’ils seront le couple parfait,
Que la femme enfantera, dans la joie, des enfants à leur image,
On dit que leur bonheur ne cédera pas à l’ennui, ni leur désir à la lassitude,
On dit qu’on aurait voulu naître tel père et telle mère
Et vivre les années qui suivront cette noce,
On dit, mais on n’est pas certain, qu’ils ont, à l’instant, échangé leur premier
baiser.

On dit, et de cela on est sûr, qu’ils sont les enfants de la terre
Que leurs vertus, leurs pensées et leurs désirs ignorent tout ce qui n’est pas
la terre,
Qu’ils goûteront sans danger à tous les fruits.
Et, toi, Calixto, étoile de la terre, à peine visible dans la lumière,
Tu continues à servir de repère sur notre route certaine vers un but lointain.
Mais le regard que nous portons sur toi s’envole et rompt le fil qui devrait
t’attacher à nous et nous à toi.
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MessageSujet: Re: Robert Desnos. (1900-1945) Calixto. (Septembre 1943)   Robert Desnos. (1900-1945) Calixto. (Septembre 1943) - Page 2 Icon_minitimeMar 30 Oct - 11:16

Mais tu te trisses, tu décarres
Et dans la boîte à réfléchir
La der des noyes, malabare,
Remet du noir et plus que mare
Nous corne qu’il faut dégauchir.
Minute! à la dernière gare
Le dur attendra mézigo:
Signé « Canrobert » ou « Gigot ».

À revivre tous les naufrages
Pour en être sauvé toujours
Par la vague même et l’orage,
Tel atteignit un paysage
Au-delà des nuits et des jours.
C’était le domaine des sages,
Il en donna la clé aux fous
Pour chercher un lieu sans verrous.

À s’endormir à la légère,
Ô lumière, ô Calixto,
Il prit la route buissonnière
Vers un réveil qui le libère
Autant des ports que des bateaux.
À s’endormir à la légère,
En retrouvant la pesanteur
Il retrouva son créateur,

À s’endormir à la légère:
La terre et, seulement, la terre...
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Robert Desnos. (1900-1945) Calixto. (Septembre 1943)
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