Le Boeuf Et La Rose.
De connivence avec le salpêtre et les montagnes, le boeuf noir à l’oeil clos par
une rose entreprend la conquête de la vallée, de la forêt et de la lande.
Là où les fleurs de pissenlit s’étoilent gauchement dans le firmament vert d’une
herbe rare,
Là où resplendissent les bouses grasses et éclatantes, les soleils de mauvaise
grâce et les genêts précieux,
Là où les blés sont mûrs, là où l’argile taillée en branches et fendillée offre
des ravines aux ébats des scarabées,
Là où le scorpion jaune aime et meurt de son amour et s’allonge tout raide,
Là où le sable en poudre d’or aveugle le chemineau.
D’un pas lourd, balançant sa tête géante sur une encolure fourrée, et de sa
queue battant à intervalles égaux sa croupe charnue,
Le boeuf noir comme l’encre surgit, passe et disparaît.
Il écrase et paraphe de sa tache le paysage éclatant
Et ses cornes attendent qu’il choisisse la bonne orientation
Pour porter un soleil à sa mort dans leur orbite ouverte sur le vide,
Mettant plus d’un reflet sur ses poils luisants et projetant, tache issue d’une
tache,
Son ombre fabuleuse sur la terre avide d’une pluie prochaine
Et du vol incertain des papillons,
Ou peut-être une rose éclatante issue de la seule atmosphère et grandissant
entre les branches de leur croissant comme un fantôme de fleur.