PLUME DE POÉSIES
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

PLUME DE POÉSIES

Forum de poésies et de partage. Poèmes et citations par noms,Thèmes et pays. Écrivez vos Poésies et nouvelles ici. Les amoureux de la poésie sont les bienvenus.
 
AccueilPORTAILS'enregistrerDernières imagesConnexion
 

 Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII

Aller en bas 
AuteurMessage
James
FONDATEUR ADMINISTRATEUR
FONDATEUR ADMINISTRATEUR
James


Masculin
Dragon
Nombre de messages : 152551
Age : 60
Localisation : Mon Ailleurs c'est Charleville-Mézières
Date d'inscription : 04/09/2007

Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII Empty
MessageSujet: Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII   Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII Icon_minitimeLun 10 Déc - 22:17

LETTRE XLVII.

du comte De Mirbelle, à Madame De Syrcé.
votre arrêt est prononcé! Qu'ai-je lu!
Qui vous l'a dit? Gardez-vous de le croire. Non,
il ne l'est pas; n'écoutez point des barbares qui
vous trompent; n'ajoutez foi qu'à l'amant qui
vous rassure. Vous, me quitter! Vous! Je ne reçois
point votre adieu, votre adieu cruel... au
nom de mon amour, de l'amour le plus tendre,
le plus malheureux, le plus désespéré, reprenez
votre courage. S'il est un être juste, il veille sur
vos jours, il vous protege, il vous aime; mes
pleurs l'attendriront; et s'il déchiroit nos noeuds,
son bonheur, quel qu'il soit, seroit troublé par
l'excès de mon infortune. Ne craignez rien, il
me semble que, tant que je respire, le ciel même
n'a point de pouvoir sur vos jours; cette illusion
suspend mes terreurs. Quoi, c'est vous,
c'est bien vous qui m'avez écrit? Je la mets sur
mon coeur cette lettre, cette précieuse lettre,
cher monument d'une sensibilité dont il n'y eut
jamais d'exemple. Votre ame y est toute entiere,
cette ame à la fois douce, courageuse et profonde,
et qui est vraiment un rayon de la divinité.
Quoi, cette ame de feu s'éteindroit! Elle
ne sentiroit plus l'amour! La tombe dévoreroit...
mes yeux se couvrent de larmes. Qui,
moi! Moi, malheureux, je vous aurois connue,
pour être votre bourreau! Sous la riante image
du bonheur, le sort implacable nous auroit
caché un avenir aussi funebre! J'aurois porté la
mort dans votre sein, le gage de notre union
s'y anéantiroit, et je perdrois à la fois deux
êtres sacrés pour mon coeur! Je ne puis envisager
cet abyme. ô toi, sans qui je ne saurois
vivre un seul instant, que tes craintes s'évanouissent;
ne partage que mon espoir. Il sera
rempli, si Madame De Sancerre n'a point une ame
cruelle. Je lui ai écrit; j'implore de sa bonté la
grace de te voir, de te parler; sans doute elle me
l'accordera. Sophie te remettra ma lettre; les
caracteres en sont presqu'effacés par mes pleurs;
mais si tes yeux peuvent s'ouvrir, ils m'y
reconnoîtront encore. Je lui ai bien recommandé de
choisir un moment où tu serois moins foible,
pour te la laisser lire; tu y verras l'amour que tu
inspires, les craintes qui m'accablent, les
espérances qui me consolent. Ma chere maîtresse,
que Madame De Sancerre tarde à me répondre!
Va, je souffre tous les maux ensemble. Te savoir
mourante, et vivre loin de toi, vivre dans des
transes éternelles; pleurer le jour, pleurer la
nuit, rejeter toute consolation, relire sans cesse
tes lettres, couvrir ton portrait de baisers et de
larmes, lui parler comme s'il pouvoit m'entendre
et me répondre, imprimer ma bouche et
mon ame sur les moindres gages de ta tendresse,
voilà l'emploi de tous mes instans, mes occupations
douloureuses et cheres; voilà ce que je
fais sans cesse, et je n'y suis arraché que par un
abattement qui ressembleroit à la mort, s'il n'étoit
encore plus horrible qu'elle. Je ne puis finir
ma lettre. En ce moment ou je m'entretiens avec
toi... les sanglots m'oppressent...
adieu, mon amie, ma maîtresse! Adieu, toi,
l'épouse de mon coeur!... on ne m'apporte
point de réponse. Je frémis, je tremble...
quel état!... je me meurs! Je t'adore!...
tu vivras; oui, tu vivras... et ton amant,
ton amant fidele!... je te quitte malgré moi...
adieu... il faut que je te voie; il le faut!...
les barbares! Ils ne me priveront pas plus long-tems
de ta présence.
Billet.
du comte, à Sophie.
ô ma Sophie, je me trouverai à l'heure indiquée
à la porte de l'hôtel; je serai déguisé,
les gens ne pourront me reconnoître. Ma Sophie!...
tous les coeurs sont féroces. Madame De Sancerre...
ah, dieu!... ma Sophie, je
te dois tout; tu as remis ma lettre. Ta maîtresse
en a lu quelques lignes!... son front étoit
serein, mais une foiblesse l'a empêchée de poursuivre.
Une foiblesse!... elle est plus mal, et
c'est à moi qu'il faut le reprocher! Le ciel m'a
donc fait naître pour son tourment. Elle expire,
et je hâte peut-être... moi! Qu'ai-je dit! C'en
est trop, je succombe; si mes cris alloient être
entendus! Je sors de chez mon pere, je vais
errer jusqu'à l'heure du fatal rendez-vous. Quel
jour, quel jour funebre! S'il m'enleve ce que
j'aime, puisse-t-il être le dernier pour toute la
nature!
Adieu; je te remercie, et dans ces instans où
mon ame n'est ouverte qu'à la douleur, j'ai
encore la force de sentir ton bienfait.



_________________
J'adore les longs silences, je m'entends rêver...  
James
Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII Une_pa12Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII Plumes19Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII Miniat14Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII James_12Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII Confes12

Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII Sceau110
Revenir en haut Aller en bas
https://www.plumedepoesies.org
 
Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE II LETTRE XLVII
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE I LETTRE XLVII
» Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE I BILLET PARTIE I LETTRE XLVII
» Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE I LETTRE XII
» Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE I LETTRE XLI
» Claude-Joseph Dorat (1734-1780) PARTIE I LETTRE LV

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
PLUME DE POÉSIES :: POÈTES & POÉSIES INTERNATIONALES :: POÈMES FRANCAIS-
Sauter vers: