VI
Las, où est maintenant ce mespris de Fortune?
Où est ce coeur vainqueur de toute adversité,
Cest honneste desir de l'immortalité,
Et ceste honneste flamme au peuple non commune?
Où sont ces doulx plaisirs, qu'au soir sous la nuict brune
Les Muses me donnoient; alors qu'en liberté
Dessus le verd tapy d'un rivage escuarté
Je les menois danser aux rayons de la Lune?
Maintenant la Fortune est maistresse de moy,
Et mon coeur qui souloit estre maistre de soy,
Est serf de mille maulx et regrets qui m'ennuyent.
De la posterité je n'ay plus de soucy,
Ceste divine ardeur, je ne l'ay plus aussi,
Et les Muses de moy, comme estranges, s'enfuyent.