PLUME DE POÉSIES
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

PLUME DE POÉSIES

Forum de poésies et de partage. Poèmes et citations par noms,Thèmes et pays. Écrivez vos Poésies et nouvelles ici. Les amoureux de la poésie sont les bienvenus.
 
AccueilPORTAILS'enregistrerDernières imagesConnexion
 

 François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 2

Aller en bas 
AuteurMessage
Invité
Invité




François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 2 Empty
MessageSujet: François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 2   François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 2 Icon_minitimeJeu 24 Jan - 8:26

DIALOGUE 2


Hercule et Thésée.
Les reproches que se font ici ces deux héros en
apprennent l' histoire et le caractère d' une
manière courte et ingénieuse.

Thésée.
Hercule, tu me surprends : je te croyois
dans le haut Olympe à la table des dieux. Le
bruit couroit que, sur le mont Oeta, le feu
avoit consumé en toi toute la nature mortelle
que tu tenois de ta mère, et qu' il ne te restoit
plus que ce qui venoit de Jupiter. Le bruit
couroit aussi que tu avois épousé Hébé, qui
est de grand loisir depuis que Ganymède verse
le nectar en sa place.

Hercule.
Ne sais-tu pas que ce n' est ici que mon ombre ?

Thésée.
Ce que tu vois n' est aussi que la mienne. Mais
quand elle est ici, je n' ai rien dans l' Olympe.

Hercule.
C' est que tu n' es pas comme moi fils de Jupiter.

Thésée.
Bon ! éthra ma mère, et mon père Egeus,
n' ont-ils pas dit que j' étois fils de Neptune ;
comme Alcmène, pour cacher sa faute pendant
qu' Amphitryon étoit au siège de Thèbes, lui fit
accroire qu' elle avoit reçu une visite de Jupiter ?

Hercule.
Je te trouve bien hardi de te moquer du dompteur
des monstres. Je n' ai jamais entendu raillerie.

Thésée.
Mais ton ombre n' est guère à craindre. Je ne vais
point dans l' Olympe rire aux dépens du fils de
Jupiter immortalisé. Pour des monstres, j' en ai
dompté en mon temps aussi bien que toi.

Hercule.
Oserois-tu comparer tes foibles actions avec
mes travaux ? On n' oubliera jamais le lion de
Némée, pour lequel sont établis les jeux
néméaques ; l' hydre de Lerne, dont les têtes se
multiplioient ; le sanglier d' érymanthe ; le
cerf aux pieds d' airain ; les oiseaux de
Stymphale ; l' amazone dont j' enlevai la ceinture ;
l' étable d' Augée ; le taureau que je traînai dans
l' Hespérie ; Cacus, que je vainquis ; les
chevaux de Diomède, qui se nourrissoient de
chair humaine ; Géryon, roi des Espagnes, à
trois têtes ; les pommes d' or du jardin des
Hespérides ; enfin Cerbère, que je traînai hors
des enfers, et que je contraignis de voir la
lumière.

Thésée.
Et moi, n' ai-je pas vaincu tous les brigands
de la Grèce, chassé Médée de chez mon père,
tué le Minotaure, et trouvé l' issue du
labyrinthe, ce qui fit établir les jeux
isthmiques ? Ils valent bien ceux de Némée. De plus,
j' ai vaincu les amazones qui vinrent assiéger
Athènes. Ajoute à ces actions le combat des
Lapithes, le voyage de Jason pour la toison d' or,
et la chasse du sanglier de Calydon où j' ai eu
tant de part. J' ai osé, aussi bien que toi,
descendre aux enfers.

Hercule.
Oui, mais tu fus puni de ta folle entreprise ;
tu ne pris point Proserpine. Cerbère, que je
traînai hors de son antre ténébreux, dévora
à tes yeux ton ami, et tu demeuras captif. As-tu
oublié que Castor et Pollux reprirent dans
tes mains Hélène leur soeur ? Tu leur laissas
aussi enlever ta pauvre mère éthra. Tout cela
est d' un foible héros. Enfin tu fus chassé
d' Athènes ; et te retirant dans l' île de Scyros,
Lycomède, qui savoit combien tu étois accoutumé
à faire des entreprises injustes, pour te
prévenir te précipita du haut d' un rocher.
Voilà une belle fin !

Thésée.
La tienne est-elle plus honorable de devenir
amoureux d' Omphale, chez qui tu filois, puis
la quitter pour la jeune Iole au préjudice de
la pauvre Déjanire à qui tu avois donné ta foi,
se laisser donner la tunique trempée dans le
sang du centaure Nessus, devenir furieux
jusqu' à précipiter des rochers du mont Oeta dans
la mer le pauvre Lichas, qui ne t' avoit rien
fait, et prier Philoctète en mourant de cacher
ton sépulcre afin qu' on te crût un dieu ? Cette
fin est-elle plus belle que ma mort ? Au moins,
avant que d' être chassé par les athéniens, je
les avois tirés de leurs bourgs, où ils vivoient
avec barbarie, pour les civiliser et leur donner
des lois dans l' enceinte d' une nouvelle ville. Pour
toi, tu n' avois garde d' être législateur ; tout
ton mérite étoit dans tes bras nerveux et dans
tes épaules larges.

Hercule.
Mes épaules ont porté le monde pour soulager
Atlas. De plus, mon courage étoit admiré. Il est
vrai que j' ai été trop attaché aux femmes : mais
c' est bien à toi à me le reprocher, toi qui
abandonnas avec ingratitude
Ariane qui t' avoit sauvé la vie en Crète !
Penses-tu que je n' aie point entendu parler de
l' amazone Antiope, à laquelle tu fus encore
infidèle ? églé, qui lui succéda, ne fut pas plus
heureuse. Tu avois enlevé Hélène, mais ses
frères te surent bien punir. Phèdre t' avoit
aveuglé jusqu' au point qu' elle t' engagea à faire
périr Hippolyte, que tu avois eu de l' amazone.
Plusieurs autres ont possédé ton coeur, et ne
l' ont pas possédé long-temps.

Thésée.
Mais enfin je ne filois pas comme celui qui
a porté le monde.

Hercule.
Je t' abandonne ma vie lâche et efféminée
en Lydie : mais tout le reste est au-dessus de
l' homme.

Thésée.
Tant pis pour toi que tout le reste étant
au-dessus de l' homme, cet endroit soit si fort
au-dessous. D' ailleurs tes travaux que tu vantes
tant, tu ne les as accomplis que pour obéir
à Eurysthée.

Hercule.
Il est vrai que Junon m' avoit assujetti à
toutes ses volontés. C' est la destinée de la vertu
d' être livrée à la persécution des lâches et des
méchants. Mais sa persécution n' a servi qu' à
exercer ma patience et mon courage. Au contraire,
tu as souvent fait des choses injustes. Heureux
le monde, si tu ne fusses point sorti du
labyrinthe !

Thésée.
Alors je délivrai Athènes du tribut de sept
jeunes hommes et d' autant de filles que Minos
lui avoit imposé à cause de la mort de son fils
Androgée. Hélas ! Mon père égée, qui
m' attendoit, ayant cru voir la voile noire au lieu
de la blanche, se jeta dans la mer, et je le
trouvai mort en arrivant. Dès-lors je gouvernai
sagement Athènes.

Hercule.
Comment l' aurois-tu gouvernée puisque tu
étois tous les jours dans de nouvelles expéditions
de guerre, et que tu mis, par tes amours, le feu
dans toute la Grèce ?

Thésée.
Ne parlons plus d' amours : sur ce chapitre
honteux nous ne nous en devons rien l' un à l' autre.
Je l' avoue de bonne foi, je te le cède même
pour l' éloquence ; mais ce qui décide, c' est que
tu es dans les enfers à la merci de Pluton, que
tu as irrité, et que je suis au rang des
immortels dans le haut Olympe.


Revenir en haut Aller en bas
 
François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 2
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 16
» François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 32
» François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 48
» François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 64
» François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 17

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
PLUME DE POÉSIES :: POÈTES & POÉSIES INTERNATIONALES :: POÈMES FRANCAIS-
Sauter vers: