La joie du poète
8 juin 1906
A Clotilde PESTEL.
Fuyez loin de mes yeux images sépulcrales
Mort va-t-en je te chasse aux portes du Néant
La cloche va sonner les heures triomphales
Comme un plaisir nouveau dans le coeur d'un enfant.
Chagrin rentrez dans l'ombre et vous fuyez mes larmes
Mes yeux en ce beau jour ont cessé de pleurer
Mon coeur n'est plus troublé par les sombres alarmes
Dont j'aimais recevoir jadis le dur baiser.
Et toi nuit où le rêve aux visions obscures
Puisait tant de douleurs et de profonds soupirs
Comme tu sais chanter tes sublimes murmures
Comme les jours heureux chantent leurs souvenirs.
Et toi belle nature au baiser qui console
Tu chantes ma gaieté. Tu ris mon bonheur
Comme je suis heureux ma tristesse s'envole
Où jadis je venais écouter ma douleur.
Le livre de la vie est ouvert à la page
Où l'amour à grands flots verse la volupté
Je suis le voyageur qui s'arme de courage
Pour suivre son chemin quand il s'est reposé.
Si j'ai souffert jadis l'heure de la victoire
En sonnant dans mon coeur a su me consoler
Et comme un grand guerrier à l'ombre de la gloire
Après tant de combats je puis me reposer.
Le printemps de l'amour refleurit dans mon âme
Et me fait oublier la rigueur des hivers
Le soleil dans mes yeux a reflété la flamme
Et ma muse a semé la douceur dans mes vers.
Clotilde c'est à vous que je dois la caresse
De ces jours bienheureux que je vais prodiguer
Il n'a fallu qu'un mot pour chasser ma tristesse
Et ce mot votre lèvre a su le prononcer.
C'est le mot de l'amour c'est le baiser d'un rêve
Qui sème dans nos coeurs une étrange gaieté
Il vivra malgré tout jusque dans l'heure brève
Dans mon coeur pour toujours votre main l'a gravé.
Il est doux à mon coeur de répandre sa joie lui qui depuis longtemps n'exhalait
que des pleurs.
Honoré HARMAND