Le Québec
Par nobile fratrum.
HORACE.
Le Couchant luit là-bas comme un vaste incendie;
Le soleil sur les flots sème un rayon mourant;
Les derniers bruits du jour chantent leur mélodie;
Et, dressant fièrement sa carène hardie.
Le Québec fend au vol les eaux du Saint-Laurent.
Le long panache dont su tête est couronnée
Déroule dans les airs ses ondoyants réseaux;
Il tourmente à grand bruit, la vague déchaînée...
Il passe, il fuit, laissant une longue traînée
Noire dans le ciel pur et blanche sur les eaux.
O fleuve, qu’ils sont loin les jours où nul servage
N’avait encor dompté ton orgueil éclatant;
Où do légers wigwams ornaient seuls ton rivage;
Où tu n’avais bercé sur ta houle sauvage
Que la frôle pagaie et le bouleau flottant!
Penchant leur front pensif sur ton urne qui gronde,
O vieux Niagara, qu’ont donc dit tes forêts,
Eu voyant, jusqu’au fond de ta grotte profonde,
Ta sombre royauté crouler comme ton onde,
Et s’éclipser devant ce géant du progrès?
Vous êtes rois tous deux, étonnante structure
Et toi, fier Saint-Laurent, au cours majestueux:
Si l’un est couronné par sa belle nature
L’autre, voguant drapé dans son architecture,
Est noble comme lui, comme lui fastueux!
À bord du Québec, 2 juillet 1866.