La belle est au jardin d’amour,
Voilà un mois ou six semaines.
Son père la cherche partout
Et son amant qu’est bien en peine.
Faut demander à ce berger
S’il ne l’a vue dedans la plaine.
« Berger, berger, n’as-tu point vu
Passer ici la beauté même ?
— Comment est-elle donc vêtue ?
Est-ce de soie ou bien de laine ?
— Elle est vêtue de satin blanc
Dont la doublure est de futaine.
— Elle est là-bas dans ce vallon,
Assise au bord d’une fontaine ;
Entre ses mains tient un oiseau,
La belle lui conte ses peines.
— Petit oiseau, tu es heureux
D’être entre les mains de ma belle !
Et moi qui suis son amoureux,
Je ne puis pas m’approcher d’elle.
— Faut-il être auprès du ruisseau,
Sans pouvoir boire à la fontaine ?
— Buvez, mon cher amant, buvez,
Car cette eau-là est souveraine.
— Faut-il être auprès du rosier,
Sans en pouvoir cueillir la rose ?
— Cueillez, mon cher amant, cueillez,
Car c’est pour vous qu’elle est éclose. »
in 17 (fin du 17e siècle)