Le Vieux
Le vieil homme exempt de remords
Que le Temps épargne, ô mystère!
Est seul, tous ses enfants sont morts;
Nul ne le connaît sur la terre.
Il est trop vieux pour travailler.
Donc, après la vie âpre et dure,
Il a, pour se ravitailler,
Le pain ramassé dans l'ordure.
Devant ses yeux humiliés
La foule heureuse passe et joue,
Et par les trous de ses souliers
Ses pieds nus traînent dans la boue.
Cependant son coeur est sans fiel,
Et, dans l'ombre où son vieux front penche,
La neige qui tombe du ciel
S'engouffre dans sa barbe blanche.