Le père et la mère
Les marquis de Final ont leur royal tombeau
Dans une cave où luit, jour et nuit, un flambeau ;
Le soir, l'homme qui met de l'huile dans les lampes
A son heure ordinaire en descendit les rampes ;
Là, mangé par les vers dans l'ombre de la mort,
Chaque marquis auprès de sa marquise dort,
Sans voir cette clarté qu'un vieil esclave apporte.
A l'endroit même où pend la lampe, sous la porte,
Était le monument des deux derniers défunts ;
Pour raviver la lampe et brûler des parfums,
Le serf s'en approcha ; sur la funèbre table,
Sculpté très-ressemblant, le couple lamentable
Dont Isora, sa dame, était l'unique enfant,
Apparaissait ; tous deux, dans cet air étouffant,
Silencieux, couchés côte à côte, statues
Aux mains jointes, d'habits seigneuriaux vêtues,
L'homme avec son lion, la femme avec son chien.
Il vit que le flambeau nocturne brûlait bien ;
Puis, courbé, regarda, des pleurs dans la paupière,
Ce père de granit, cette mère de pierre ;
Alors il recula, pâle ; car il crut voir
Que ces deux fronts, tournés vers la voûte au fond noir,
S'étaient subitement assombris sur leur couche,
Elle, ayant l'air plus triste, et lui, l'air plus farouche.