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 Alfred De Musset (1810-1857) RÉPONSE A M. CHARLES NODIER

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Inaya
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Alfred De Musset (1810-1857) RÉPONSE A M. CHARLES NODIER Empty
MessageSujet: Alfred De Musset (1810-1857) RÉPONSE A M. CHARLES NODIER   Alfred De Musset (1810-1857) RÉPONSE A M. CHARLES NODIER Icon_minitimeMar 18 Sep - 22:25

RÉPONSE A M. CHARLES NODIER

Connais-tu deux pestes femelles
Et jumelles
Qu'un beau jour tira de l'enfer
Lucifer?

L'une au teint blême, au coeur de lièvre,
C'est la Fièvre;
L'autre est l'Insomnie aux grands yeux
Ennuyeux.

Non pas cette fièvre amoureuse,
Trop heureuse,
Qui sait chiffonner l'oreiller
Sans bâiller;

Non pas cette belle insomnie
Du génie,
Où Trilby vient, prêt à chanter,
T'écouter.

C'est la fièvre qui s'emmaillote
Et grelotte
Sous un drap sale et trois coussins
Très malsains.

L'autre, comme une huître qui bâille
Dans l'écaille,
Rêve ou rumine, ou fait des vers
De travers.

Voilà, depuis une semaine
Toute pleine,
L'aimable et gai duo que j'ai
Hébergé.

Que ce soit donc, si l'on m'accuse,
Mon excuse,
Pour n'avoir rien ni répondu
Ni pondu.

Ne me fais pas, je t'en conjure,
Cette injure
De supposer que j'ai faibli
Par oubli.

L'oubli, l'ennui, font, ce me semble,
Route ensemble,
Traînant, deux à deux, leurs pas lents.
Nonchalants.

Tout se ressent du mal qu'ils causent,
Mais ils n'osent
Approcher de toi seulement
Un moment.

Que ta voix si jeune et si vieille,
Qui m'éveille,
Vient me délivrer à propos
Du repos !

Ta muse, ami, toute française,
Tout à l'aise,
Me rend la soeur de la santé,
La gaieté.

Elle rappelle à ma pensée
Délaissée
Les beaux jours et les courts instants,
Du bontemps.

Lorsque, rassemblés sous ton aile
Paternelle,
Echappés de nos pensions,
Nous dansions;

Gais comme l'oiseau sur la branche,
Le dimanche,
Nous rendions parfois matinal
L'Arsenal.

La tête coquette et fleurie
De Marie
Brillait comme un bluet mêlé
Dans le blé.

Tachés déjà par l'écritoire,
Sur l'ivoire
Ses doigts légers allaient sautant
Et chantant;

Quelqu'un récitait quelque chose,
Vers ou prose,
Puis nous courions recommencer
A danser.

Chacun de nous, futur grand homme.
Ou tout comme,
Apprenait plus vite à t'aimer
Qu'à rimer.

Alors, dans la grande boutique
Romantique,
Chacun avait, maître ou garçon,
Sa chanson.

Nous allions, brisant les pupitres
Et les vitres,
Et nous avions plume et grattoir
Au comptoir.

Hugo portait déjà dans l'âme
Notre-Dame,
Et commençait à s'occuper
D'y grimper.

De Vigny chantait sur sa lyre
Ce beau sire
Qui mourut sans mettre à l'envers
Ses bas verts.

Antony battait avec Dante
Un andante;
Emile ébauchait vite et tôt
Un presto.

Sainte-Beuve faisait dans l'ombre,
Douce et sombre,
Pour un ceil noir, un blanc bonnet,
Un sonnet.

Et moi, de cet honneur insigne
Trop indigne,
Enfant par hasard adopté
Et gâté,

Je brochais des ballades, l'une
A la lune,
L'autre à deux yeux noirs et jaloux,
Andaloux.

Cher temps, plein de mélancolie,
De folie,
Dont il faut rendre à l'amitié
La moitié !

Pourquoi sur ces flots où s'élance
L'Espérance,
Ne voit-on que le Souvenir
Revenir?

Ami, toi qu'a piqué l'abeille,
Ton coeur veille,
Et tu n'en saurais ni guérir
Ni mourir;

Mais comment fais-tu donc, vieux maître,
Pour renaître?
Car tes vers, en dépit du temps,
Ont vingt ans.

Si jamais ta tête qui penche
Devient blanche,
Ce sera comme l'amandier,
Cher Nodier.

Ce qui le blanchit n'est pas l'âge,
Ni l'orage;
C'est la fraîche rosée en pleurs
Dans les fleurs.

Août 1843.
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Alfred De Musset (1810-1857) RÉPONSE A M. CHARLES NODIER
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