PLUME DE POÉSIES
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

PLUME DE POÉSIES

Forum de poésies et de partage. Poèmes et citations par noms,Thèmes et pays. Écrivez vos Poésies et nouvelles ici. Les amoureux de la poésie sont les bienvenus.
 
AccueilPORTAILS'enregistrerDernières imagesConnexion
 

 Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER.

Aller en bas 
AuteurMessage
James
FONDATEUR ADMINISTRATEUR
FONDATEUR ADMINISTRATEUR
James


Masculin
Dragon
Nombre de messages : 152365
Age : 60
Localisation : Mon Ailleurs c'est Charleville-Mézières
Date d'inscription : 04/09/2007

Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER. Empty
MessageSujet: Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER.   Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER. Icon_minitimeMer 3 Oct - 22:25

L'ÉCOLIER.

Un tout petit enfant s'en allait à l'école.
On avait dit. Allez!... il tâchait d'obéir;
Mais son livre était lourd, il ne pouvait courir.
Il pleure et suit des yeux une abeille qui vole.
«Abeille, lui dit-il, voulez-vous me parler?
Moi, je vais à l'école: il faut apprendre à lire;
Mais le maître est tout noir, et je n'ose pas rire:
Voulez-vous rire, abeille, et m'apprendre á voler?»

«Non, dit-elle; j'arrive et je suis très-pressée.
J'avais froid; l'aquilon m'a long-temps oppressée:
Enfin, j'ai vu les fleurs, je redescends du ciel,
Et je vais commencer mon doux rayon de miel.
Voyez! j'en ai déjà puisé dans quatre roses;
Avant une heure encor nous en aurons d'écloses.
Vite, vite à la ruche! on ne rit pas toujours:
C'est pour faire le miel qu'on nous rends les beaux jours.»

Elle fuit et se perd sur la route embaumée.
Le frais lilas sortait d'un vieux mur entr'ouvert;
Il saluait l'aurore, et l'aurore charmée
Se montrait sans nuage et riait de l'hiver.
Une hirondelle passe: elle effleure la joue
Du petit nonchalant qui s'attriste et qui joue.
Et dans l'air suspendue, en redoublant sa voix,
Fait tressaillir l'écho qui dort au fond des bois.

«Oh! bonjour! dit l'enfant, qui se souvenait d'elle;
Je t'ai vue à l'automne; oh! bonjour, hirondelle.
Viens! tu portais bonheur à ma maison, et moi
Je voudrais du bonheur. Veux-tu m'en donner, toi?
Jouons.-Je le voudrais, répond la voyageuse,
Car je respire à peine, et je me sens joyeuse.
Mais j'ai beaucoup d'amis qui doutent du printemps;
Ils rêveraient ma mort si je tardais long-temps.
Non, je ne puis jouer. Pour finir leur souffrance,
J'emporte un brin de mousse en signe d'espérance.
Nous allons relever nos palais dégarnis:
L'herbe croît, c'est l'instant des amours et des nids.
J'ai tout vu. Maintenant, fidèle messagère,
Je vais chercher mes soeurs, là-bas, sur le chemin.
«Ainsi que nous, enfant, la vie est passagère,
Il faut en profiler. Je me sauve.... A demain!»

L'enfant reste muet; et, la tête baissée,
Rêve et compte ses pas, pour tromper son ennui,
Quand le livre importun, dont sa main est lassée,
Rompt ses fragiles noeuds, et tombe auprès de lui.

Un dogue l'observait du seuil de sa demeure.
Stentor, gardien sévère et prudent à la fois,
De peur de l'effrayer retient sa grosse voix.
Hélas! peut-on crier contre un enfant qui pleure?
«Bon dogue, voulez-vous que je m'approche un peu,
Dit l'écolier plaintif? Je n'aime pas mon livre;
Voyez! ma main est rouge, il en est cause. Au jeu
Rien ne fatigue, on rit; et moi je voudrais vivre
Sans aller à l'école, où l'on tremble toujours;
Je m'en plains tous les soirs, et j'y vais tous les jours;
«J'en suis très-mécontent. Je n'aime aucune affaire.
Le sort des chiens me plaît, car ils n'ont rien à faire.»

«Écolier! voyez-vous ce laboureur aux champs?
Eh bien! ce laboureur, dit Stentor, c'est mon maître.
Il est très-vigilant; je le suis plus, peut-être.
Il dort la nuit, et moi j'écarte les méchants.
J'éveille aussi ce boeuf qui, d'un pied lent, mais ferme,
Va creuser les sillons quand je garde la ferme.
Pour vous même on travaille; et, grâce à vos brebis,
Votre mère, en chantant, vous file des habits.
Par le travail tout plaît, tout s'unit, tout s'arrange.
Allez donc à l'école; allez, mon petit ange!
Les chiens ne lisent pas, mais la chaîne est pour eux:
L'ignorance toujours mène à la servitude.
L'homme est fin, l'homme est sage, il nous défend l'étude,
«Enfant, vous serez homme, et vous serez heureux;
Les chiens vous serviront.» L'enfant l'écouta dire,
Et même il le baisa. Son livre était moins lourd.
En quittant le bon dogue, il pense, il marche, il court.
L'espoir d'être homme un jour lui ramène un sourire.

À l'école, un peu tard, il arrive gaîment,
Et dans le mois des fruits il lisait couramment.

_________________
J'adore les longs silences, je m'entends rêver...  
James
Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER. Une_pa12Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER. Plumes19Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER. Miniat14Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER. James_12Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER. Confes12

Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER. Sceau110
Revenir en haut Aller en bas
https://www.plumedepoesies.org
 
Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'ÉCOLIER.
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'Impossible
» Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) LA LUMIÈRE.
» Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) LA DÉSERTION. I.
» Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) ROMANCES OU VAS-TU ?
» Marceline Desbordes-Valmore.(1786-1859) L'Églantine

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
PLUME DE POÉSIES :: POÈTES & POÉSIES INTERNATIONALES :: POÈMES FRANCAIS-
Sauter vers: