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 Louis Fréchette (1839-1908) Mes loisirs Prologue

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Louis Fréchette (1839-1908) Mes loisirs Prologue Empty
MessageSujet: Louis Fréchette (1839-1908) Mes loisirs Prologue   Louis Fréchette (1839-1908) Mes loisirs Prologue Icon_minitimeVen 3 Mai - 8:53

Prologue

Quand le souffle attiédi des brises parfumées
Fait reverdir nos bois;
Quand l'essaim des zéphyrs vient peupler les ramées
D'harmonieuses voix;

Quand le printemps doré vient éployer son aile
Sur la nature en fleurs;
Quand le bosquet revêt sa robe solennelle,
Sa robe aux cent couleurs;

Quand la forêt reprend ses suaves murmures
Et son front rajeuni,
Quand les oiseaux du ciel sous l'arceau des ramures
Ont suspendu leur nid;

Quand on voit reverdir sous l'effort de la sève
Les troncs chauves et nus,
Et que tout ce qui vit s'émeut, palpite et rêve
Des plaisirs inconnus;

Sous les mille buissons qui parfument la rive
De leurs rameaux fleuris,
Qui n'a pas entendu la fauvette plaintive
Pousser de faibles cris?

Qui n'a pas remarqué sa frayeur maternelle,

Et sous le feuillage agité,
La pauvrette cherchant, tournant, battant de l'aile
Autour de son nid déserté?

Ah! c'est que ses petits, ses petits qu'elle adore
Depuis un instant l'ont quitté,
Ouvrant au vent du ciel leur aile faible encore
Pour goûter à la liberté!

Ô mes chansons! je suis la craintive fauvette
Qui voit ses petits, ses amours,
S'enfuir, et qui pour eux éperdue, inquiète,
Craint les aigles ou les vautours!

Ô mes vers! vous quittez les rives maternelles
Pour des pays plus fortunés!
Pour la première fois vous essayez vos ailes
Loin du nid où vous êtes nés!

Ce nid que vous quittez, chers enfants de mes veilles,
Pour vous n'est donc plus assez grand?
Et vous voulez aller bourdonner aux oreilles
D'un monde, hélas, indifférent!

Ah! Dieu vous garde, enfants, des riantes promesses
Que les trompeurs du monde font!
Car les coupes souvent les plus enchanteresses
Ont aussi plus de lie au fond!

Vous verrez bien souvent l'envieux à l'oeil louche
Et plein de lâches trahisons...

Ouvrez l'aile et fuyez... le souffle de sa bouche
Est le plus mortel des poisons!

Évitez les sentiers de l'égoïste infâme
De sa personne seule épris;
Et de tous ceux qui n'ont sur la lèvre et dans l'âme
Que le sarcasme et le mépris!

Et puis, dans votre course errante et vagabonde,
Ah! puissiez-vous toujours avoir
Pour tous les pauvres coeurs déshérités du monde,
Un mot d'amour, un mot d'espoir!
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Louis Fréchette (1839-1908) Mes loisirs Prologue
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