Le masque à gaz
Jusqu’à toi,
les tailleurs de marches s’écroulent par endroits
regardant au loin vers l’horizon,
jusqu’à toi.
Engouffrés et mous dans la cage visqueuse de l’escalier.
Les couvertures des portes, jusqu’à toi,
- des peaux de veau, déchirées
par les broches des sangliers.
En terre aromatisée (kieselguhr), ton œil sauvage,
ta bouche de mercure.
Jusqu’à toi, il y a le coin de la rue
où dorment immobiles, dans un nuage de cristal,
ceux qui n’ont ni maison, ni dieux.
Comme à travers la bouche ternie d’un canal,
à travers leurs vêtements troués,
les regarde Celui d’en Haut, avec une pitié infinie.
Jusqu’à toi, il y a le grand boulevard,
au-dessous duquel pend
à de longs crochets d’acier,
comme un masque à gaz,
le scalp des jours passés.
Et la mitrailleuse avec laquelle tu tires longuement.
Les balles bourdonnent, la caravane ne vient pas.
Jusqu’à toi - les paroles dites. Le faux pas.
Tu tires à travers les fenêtres sur toi.