PLUME DE POÉSIES
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

PLUME DE POÉSIES

Forum de poésies et de partage. Poèmes et citations par noms,Thèmes et pays. Écrivez vos Poésies et nouvelles ici. Les amoureux de la poésie sont les bienvenus.
 
AccueilPORTAILS'enregistrerDernières imagesConnexion
 

 Victor HUGO (1802-1885) Dans le cimetière de ...

Aller en bas 
AuteurMessage
Inaya
Plume d'Eau
Inaya


Féminin
Rat
Nombre de messages : 50031
Age : 63
Date d'inscription : 05/11/2010

Victor HUGO (1802-1885) Dans le cimetière de ... Empty
MessageSujet: Victor HUGO (1802-1885) Dans le cimetière de ...   Victor HUGO (1802-1885) Dans le cimetière de ... Icon_minitimeJeu 15 Sep - 20:21

DANS LE CIMETIÈRE DE...

La foule des vivants rit et suit sa folie,
Tantôt pour son plaisir, tantôt pour son tourment ;
Mais par les morts muets, par les morts qu'on oublie,
Moi, rêveur, je me sens regardé fixement.

Ils savent que je suis l'homme des solitudes,
Le promeneur pensif sous les arbres épais,
L'esprit qui trouve, ayant ses douleurs pour études,
Au seuil de tout le trouble, au fond de tout la paix !

Ils savent l'attitude attentive et penchée
Que j'ai parmi les buis, les fosses et les croix ;
Ils m'entendent marcher sur la feuille séchée ;
Ils m'ont vu contempler des ombres dans les bois,

Ils comprennent ma voix sur le monde épanchée,
Mieux que vous, ô vivants bruyants et querelleurs !
Les hymnes de la lyre en mon âme cachée,
Pour vous ce sont des chants, pour eux ce sont des pleurs.

Moi, c'est là que je vis ! - cueillant les roses blanches,
Consolant les tombeaux délaissés trop longtemps,
Je passe et je reviens, je dérange les branches,
Je fait du bruit dans l'herbe, et les morts sont contents.

Là je rêve ! et, rôdant dans le champ léthargique,
Je vois, avec des yeux dans ma pensée ouverts,
Se transformer mon âme en un monde magique,
Miroir mystérieux du visible univers.

Regardant sans les voir de vagues scarabées,
Des rameaux indistincts, des formes, des couleurs,
Là, j'ai dans l'ombre, assis sur des pierres tombées,
Des éblouissements de rayons et de fleurs.

Là, le songe idéal qui remplit ma paupière
Flotte, lumineux voile, entre la terre et nous ;
Là, mes doutes ingrats se fondent en prière ;
Je commence debout et j'achève à genoux.

Comme au creux du rocher vole l'humble colombe,
Cherchant la goutte d'eau qui tombe avant le jour,
Mon esprit altéré, dans l'ombre de la tombe,
Va boire un peu de foi, d'espérance et d'amour !

XV

Mères, l'enfant qui joue à votre seuil joyeux,
Plus frêle que les fleurs, plus serein que les cieux,
Vous conseille l'amour, la pudeur, la sagesse.
L'enfant, c'est un feu pur dont la chaleur caresse ;
C'est de la gaîté sainte et du bonheur sacré,
C'est le nom paternel dans un rayon doré ;
Et vous n'avez besoin que de cette humble flamme
Pour voir distinctement dans l'ombre de votre âme.
Mères, l'enfant que l'on pleure et qui s'en est allé,
Si vous levez vos fronts vers le ciel constellé,
Verse à votre douleur une lumière auguste ;
Car l'innocent éclaire aussi bien que le juste !
Il montre, clarté douce, à vos yeux abattus,
Derrière notre orgueil, derrière nos vertus,
Derrière nos malheurs, Dieu profond et tranquille.
Que l'enfant vive ou dorme, il rayonne toujours !
Sur cette terre où rien ne va loin sans secours,
Où nos jours incertains sur tant d'abîmes pendent,
Comme un guide au milieu des brumes que répandent
Nos vices ténébreux et nos doutes moqueurs,
Vivant, l'enfant fait voir le devoir à vos coeurs ;
Mort, c'est la vérité qu'à votre âme il dévoile.
Ici, c'est un flambeau ; là-haut, c'est une étoile.

XVI

Matelots ! matelots ! vous déploierez les voiles ;
Vous voguerez, joyeux parfois, mornes souvent ;
Et vous regarderez aux lueurs des étoiles
La rive, écueil ou port, selon le coup de vent.

Envieux, vous mordrez la base des statues.
Oiseaux, vous chanterez ! vous verdirez, rameaux !
Portes, vous croulerez de lierres revêtues.
Cloches, vous ferez vivre et rêver les hameaux.

Teignant votre nature aux moeurs de tous les hommes,
Voyageurs, vous irez comme d'errants flambeaux ;
Vous marcherez pensifs sur la terre où nous sommes,
En vous ressouvenant quelquefois des tombeaux.

Chênes, vous grandirez au fond des solitudes.
Dans les lointains brumeux, à la clarté des soirs,
Vieux saules, vous prendrez de tristes attitudes,
Et vous vous mirerez vaguement aux lavoirs.

Nids, vous tressaillirez sentant croître des ailes ;
Sillons, vous frémirez sentant sourdre le blé.
Torches, vous jetterez de rouges étincelles
Qui tourbillonneront comme un esprit troublé.

Foudres, vous nommerez le Dieu que la mer nomme.
Ruisseaux, vous nourrirez la fleur qu'avril dora ;
Vos flots refléteront l'ombre austère de l'homme.
Et vos flots crouleront, et l'homme passera.

Chaque chose et chacun, âme, être, objet ou nombre,
Suivra son cours, sa loi, son but, sa passion,
Portant sa pierre à l'oeuvre indéfinie et sombre
Qu'avec le genre humain fait la création !

Moi, je contemplerai le Dieu père du monde,
Qui livre à notre soif, dans l'ombre ou la clarté,
Le ciel, cette grande urne, adorable et profonde,
Où l'on puise le calme et la sérénité !
Revenir en haut Aller en bas
 
Victor HUGO (1802-1885) Dans le cimetière de ...
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Victor HUGO (1802-1885) Dans le cimetière de
» Victor HUGO (1802-1885) Le corbillard franchit le seuil du cimetière.
» Victor HUGO (1802-1885) Quoique je fusse assis au bord d' un cimetière,
» Victor HUGO (1802-1885) Dans ce moment-là, tout étant dans l'insondable
» Victor HUGO (1802-1885) Je vais dans la fureur du gouffre, dans l'écume

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
PLUME DE POÉSIES :: POÈTES & POÉSIES INTERNATIONALES :: POÈMES FRANCAIS-
Sauter vers: