DANS LE CIMETIÈRE DE "
Je priais, recueilli dans ma pensée. intime.
Le cimetière est doux au deuil silencieux
A cette heure où le soir ineffable et sublime
Vient à la paix des morts mêler la paix des cieux.
J'entendis qu'on marchait, je levai les paupières;
Le vent remuait l'herbe autour des crucifix,
Et je vis à pas lents venir parmi les pierres
Un aïeul par la main menant son petit-fils.
Ému, j'interrompis mes funèbres extases,
Pour les suivre des yeux et tout bas les bénir.
Un vieillard! un enfant! ô mystérieux vases!
L'un rempli du passé, l'autre de. l'avenir!
Cette petite main dans cette main débile
Me rappelait des jours enfuis, des jours meilleurs!
Le vieillard, par moments s'arrêtant immobile,
Regardait les tombeaux; l'enfant cherchait des fleurs.
Le vieillard regardait les sépulcres dans l'ombre,
Comme si, morne et blême et baigné de sueur,
A force d'y fixer son oeil profond et sombre,
Il en faisait sortir quelque étrange lueur!
15 août 1846.