PSARA
Nous triomphons! Allah! Gloire au prophète!
Sur ce rocher plantons nos étendards.
Ses défenseurs, illustrant leur défaite,
En vain sur eux font crouler ses remparts.
Nous triomphons, et le sabre terrible
Va de la croix punir les attentats.
Exterminons une race invincible:
Les rois chrétiens ne la vengeront pas.
N'as-tu, Chios, pu sauver un seul être
Qui vînt ici raconter tous tes maux?
Psara tremblante eût fléchi sous son maître.
Où sont tes fils, tes palais, tes hameaux?
Lorsque la peste en ton île rebelle
Sur tant de morts menaçait nos soldats,
Tes fils mourants disaient: n'implorons qu'elle;
Les rois chrétiens ne nous vengeront pas.
Mais de Chios recommencent les fêtes;
Psara succombe, et voilà ses soutiens!
Dans le sérail comptez combien de têtes
Vont saluer les envoyés chrétiens.
Pillons ces murs! De l'or! Du vin! Des femmes!
Vierges, l'outrage ajoute à vos appas.
Le glaive après purifîra vos ames:
Les rois chrétiens ne vous vengeront pas.
L'Europe esclave a dit dans sa pensée:
Qu'un peuple libre apparaisse! Et soudain...
Paix! Ont crié d'une voix courroucée
Les chefs que Dieu lui donne en son dédain.
Byron offrait un dangereux exemple;
On les a vus sourire à son trépas.
Du Christ lui-même allons souiller le temple:
Les rois chrétiens ne le vengeront pas.
À notre rage ainsi rien ne s'oppose;
Psara n'est plus, Dieu vient de l'effacer.
Sur ses débris le vainqueur qui repose
Rêve le sang qu'il lui reste à verser.
Qu'un jour Stamboul contemple avec ivresse
Les derniers grecs suspendus à nos mâts!
Dans son tombeau faisons rentrer la Grèce:
Les rois chrétiens ne la vengeront pas.
Ainsi chantait cette horde sauvage.
Les grecs! S'écrie un barbare effrayé.
La flotte hellène a surpris le rivage,
Et de Psara tout le sang est payé.
Soyez unis, ô grecs! Ou plus d'un traître
Dans le triomphe égarera vos pas.
Les nations vous pleureraient peut-être;
Les rois chrétiens ne vous vengeraient pas.