L'Éventail.
DANS le chaud boudoir de dentelle,
Je m'étais assis tout près d'elle;
Et, seul, son éventail ancien
Me cachait sa bouche qui tente,
Fragile barrière irritante
Entre mon désir et le sien.
Le satin aux branches légères,
Où l'on avait peint des bergères
Dans un paysage d'azur,
Frais et souple comme une palme,
M'envoyait, de son rythme calme,
Un parfum enivrant et pur.
Elle s'en faisait un complice
Pour exaspérer mon supplice,
Et, lorsque je voulais oser,
D'un geste vif de la coquette
L'éventail, devenu baguette,
Châtiait l'offre d'un baiser.
Toute ruse était inutile.
Cette bagatelle subtile
Tenait de l'aile et du rayon,
Et, voltigeant â gauche, à droite,
Évitait ma main maladroite
A cette chasse au papillon.
Qui sait comment finit la lutte?
A quelle adorable minute
Palpita-t-il à coups plus lents?...
Mais ma tête est sur ton épaule;
L'éventail a changé de rôle
Et rafraîchit nos fronts brûlants.