Au même.
Paris, 6 mai 1877.
J'ai reçu, jeudi soir, ta lettre et les journaux du 20 avril,
ainsi que les deux volumes qui sont vraiment, comme tu me
le dis, d'une espèce bien rare en France. Quelle agréable
surprise de trouver, serré dans la couverture, ce beau sucre
d'érable! Tu peux croire que je lui ai fait fête, moi qui n'avais
pas goûté depuis bientôt quinze ans à ce bon sucre du pays!
Je l'ai divisé en six parts et je m'en paie une chaque jour.
Messieurs les Français peuvent bien dire tout ce qu'ils
voudront, notre sucre d'érable est exquis et je le préfère à
toutes les sucreries artistiques de leurs confiseurs. Je te
remercie de tout mon coeur de cette délicieuse surprise.
Nous avons un froid incroyable pour la saison; il gèle
chaque nuit, et il faut faire du feu comme en hiver. J'ai peur
que les vignes ne soient atteintes.
Je commence à reprendre des forces, grâce à la nourriture
plus substantielle et au vin que je prends depuis une dizaine
de jours.