ELEGIES J'AVAIS FROID
Je l' ai rêvé ! C' eût été beau
de s' appeler ta bien-aimée,
d' entrer sous ton aile enflammée,
où l' on monte par le tombeau.
Il résume une vie entière,
ce rêve lu dans un regard :
je sais pourtant que ta paupière
en troubla mes jours par hasard.
Non, tu ne cherchais pas mes yeux
quand tu leur appris la tendresse.
Ton coeur s' essayait sans ivresse,
il avait froid, sevré des cieux.
Seule aussi dans ma paix profonde,
vois-tu ! J' avais froid comme toi,
et ta vie, en s' ouvrant au monde,
laissa tomber du feu sur moi.
Je t' aime comme un pauvre enfant
soumis au ciel quand le ciel change ;
je veux ce que tu veux, mon ange,
je rends les fleurs qu' on me défend.
Couvre de larmes et de cendre
tout le ciel de mon avenir :
tu m' élevas, fais-moi descendre.
Dieu n' ôte pas le souvenir !