POESIES POSTH. RENONCEMENT
Pardonnez-moi, seigneur, mon visage attristé,
vous qui l' aviez formé de sourire et de charmes ;
mais sous le front joyeux vous aviez mis les larmes,
et de vos dons, seigneur, ce don seul m' est resté.
C' est le moins envié, c' est le meilleur peut-être.
Je n' ai plus à mourir à mes liens de fleurs ;
ils vous sont tous rendus, cher auteur de mon être,
et je n' ai plus à moi que le sel de mes pleurs.
Les fleurs sont pour l' enfant ; le sel est pour la
femme :
faites-en l' innocence et trempez-y mes jours,
seigneur ! Quand tout ce sel aura lavé mon âme,
vous me rendrez un coeur pour vous aimer toujours !
Tous mes étonnements sont finis sur la terre,
tous mes adieux sont faits, l' âme est prête à jaillir
pour atteindre à ses fruits protégés de mystère
que la pudique mort a seule osé cueillir.
ô sauveur ! Soyez tendre au moins à d' autres mères,
par amour pour la vôtre et par pitié pour nous !
Baptisez leurs enfants de nos larmes amères,
et relevez les miens tombés à vos genoux !