Vers burlesques à monsieur de Niel
Gentil-homme de maison noble,
Qu’en noble ville de Grenoble
Je vis, item et que j’ouïs
Chanter devant le Roy Louïs,
Qui vous trouva chanson chantée
Digne d’estre son Timotée :
Car fors cil qui tant fredonna,
Que sa femme on luy redonna,
Aucun dans ce bas territoire,
Encor n’a merité la gloire
D’estre à ce Chantre comparé,
Sinon vous le Chantre adoré,
De qui le chant si bien enchante,
Que devant vous le Dieu qui chante
Seulement dire onques n’osa
Farlarirette liron fa,
Sçachant bien qu’une Damoiselle,
Qu’en France la France on appelle,
Ne connoist point d’autre Apollon
Que vous, lequel avez le don
Non de deraciner les arbres,
Ni d’attirer plantes ni marbres ;
Mais des cœurs qui sont bien plus chers
Et plus friands que des Rochers :
Desquels cœurs tant et tant attire
Vostre vertu, que l’on peut dire
Que de là vient mon bon Seigneur,
Que si peu de gens ont du cœur
Comme moy, lequel n’en ay guere,
Et qui n’en ay trop grand affaire :
Car trop grand cœur ne doit avoir
Cil qui par trop n’a grand avoir
Non comme vous homme adorable,
Qui, cœur avez tant honorable,
Comme il apparut dès le jour
Que vostre nez parut en Cour,
Ou de l’honneur c’est chose seure
Donnastes belle tablature,
Comme encore meshuy donnez
Aux gens les mieux moriginez.
Aussi la Cour son honneste homme
Vous appelle, et moy je vous nomme
L’original du beau portrait
De l’honneste homme de Faret,
Duquel attendant la copie
Je prie celuy que l’on prie,
Qu’il vous conserve sain et net
Depuis les pieds jusqu’au bonnet.