PLUME DE POÉSIES
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 François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud(1718-1805) ACTE 2 SCENE 2

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François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud(1718-1805) ACTE 2 SCENE 2 Empty
MessageSujet: François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud(1718-1805) ACTE 2 SCENE 2   François-Thomas-Marie De Baculard D'Arnaud(1718-1805) ACTE 2 SCENE 2 Icon_minitimeMar 23 Aoû - 0:26

ACTE 2 SCENE 2

Euphémie, la comtesse d'Orcé.

Euphémie troublée et se levant.
Où venez-vous?

Mélanie se retire.

La Comtesse D'Orcé serrant sa fille dans ses
bras.

Dans tes bras, partager
Tes maux, que je voudrois, ma fille, soulager...
Ah! Ce seroit à moi d'éviter ta présence.
On craint ses bienfaiteurs; mais j'aime assez Constance,
Pour voler au devant de ses soins généreux.
Et tu gémis? Ton sort...

Euphémie.
Mon sort! Il est heureux;
À mes embrassemens le ciel vous a rendue;
N'accusez point mon coeur, si je fuis votre vue...

(Elle est agitée.)

Non je ne vous fuis pas je venois en ce lieu...
Ma mère je venois j'étois aux pieds d'un dieu.
Hélas! Je l'implorois...

Elle prononce ces derniers mots d'une voix
Tombante.

La Comtesse D'Orcé.
Tes accents s'affaiblissent...
Tu détournes les yeux des larmes les remplissent!
Euphémie comme emportée par la douleur tombant
Dans les bras de sa mère, en fondant en larmes.

Après une longue pause.

Ah! Ma mère ne puis-je en ce torrent de pleurs
Exhaler mes ennuis, mes regrets, mes douleurs,
Dans ces larmes mourir? Ma raison impuissante,
Envain, les repoussoit dans mon ame expirante;
Je me suis efforcée, envain de vous cacher
Un coeur que tout trahit; contraint de s'épancher,
Il va vous découvrir ses alarmes cruelles,
Ses agitations, ses blessures mortelles,
Que loin de les calmer aigrit encor le tems;
Vous connoîtrez mes maux, l'excès de mes tourmens...
Rappelez-m'en la cause, et vous devez m'entendre...

La Comtesse D'Orcé.
Sur ton sort quel retour que je ne puis comprendre?
Qui? Moi, j'irois, ma fille, à tes yeux retracer
Un tableau, qu'aujourd'hui je voudrois effacer
De mes pleurs, de mon sang... ma chère bienfaitrice,
Écartons cette image; elle fait mon supplice,
Et tu m'as pardonné...

Euphémie baisant la main de sa mère.
Ma mère, c'est à vous
D'accorder un pardon, que j'implore à genoux;
Criminelle à regret, c'est moi qui vous offense.
Gardons sur mes malheurs un éternel silence.
Un dieu, sans doute, un dieu qui règle nos destins,
M'appeloit dans ces murs, m'en ouvroit les chemins.
Parlons de ma tendresse attachée à vous plaire,
Du bonheur que j'aurois de consoler ma mère;

Sa voix s'attendrit davantage.

Parlons non, je ne puis surmonter le desir,
L'impatiente ardeur de m'en entretenir;
Parlons de cet objet...

La Comtesse D'Orcé.

De qui?
Euphémie.
Mes pleurs, mon trouble
Vous le nomment assez mon supplice redouble.

Après une longue pause.

De Sinval...

La Comtesse D'Orcé.

De Sinval!
Euphémie.
Oui, du maître adoré
D'un coeur toujours épris, toujours plus déchiré.

La Comtesse D'Orcé.
Qu'ai-je fait? Ciel! L'amour possède encor ton ame!
Quoi! Ma fille, ce feu...

Euphémie, avec transport.

Plus que jamais m'enflamme,
Mon repos, mes devoirs lui sont sacrifiés.
Je le dis en pleurant, en mourant à vos piés,

Elle montre l'autel.

En attestant ce dieu, qui me laisse à moi-même,
Qui me voit, chaque jour, dans ce désordre extrême,
Me traîner aux autels qui ne m'écoute pas...
Dix ans de désespoir, de larmes, de combats,
Une haire sanglante à mon coeur attachée,
La terreur avec moi dans mon cercueil couchée,
Le tems, la mort, la mort par qui tout se détruit,
Rien n'a pu m'arracher au trait qui me poursuit.
Une ombre, sur mes pas sans cesse ramenée,
Emporte tous mes voeux, et me tient enchaînée...
L'ombre, hélas! De Sinval; voilà quels attentats...
Ô ciel! Tu peux m'entendre, et tu ne tonnes pas!
Dans l'horreur de la nuit, au lever de l'aurore,
Voilà l'unique Dieu que je sers, que j'adore,
À qui je cours offrir mon encens sur l'autel!
Pour des cendres, enfin, je trahis l'éternel...
Qu'ai-je dit, malheureuse? Ah! Dieu vengeur, pardonne.
Pardonne ma raison ta grace m'abandonne.

Avec transport.

Ma mère! Il n'est donc plus? Et quel funeste sort...
Notre amour mon destin j'aurai causé sa mort.

La Comtesse D'Orcé serrant sa fille dans ses
bras, et en pleurant.

Ô ma fille! à mes yeux combien je suis coupable!
Ta mère c'est ma main, Constance, qui t'accable!
J'ai creusé sous tes pas cet abîme de maux!
J'ai porté dans ton sein ces éternels bourreaux,
Cette ardeur sacrilège, et de remords suivie,
Cet indomptable amour, qui consume ta vie!
Elle la tient toujours dans son sein.
À mes crimes, ma fille, oppose ta vertu.
Si Sinval au tombeau n'étoit point descendu...

Euphémie, avec rapidité.
S'il respiroit! Sinval! Heureuse en ma misère.
Que ma chaîne à ce prix me paroîtroit légère!

La Comtesse D'Orcé.
Ma fille je pourrois adoucir ton tourment!
Apprends tous mes forfaits.

Euphémie, avec transport.

Sinval seroit vivant!
La Comtesse D'Orcé.
Je voulois avancer la fatale journée,
Qui devoit aux autels fixer ta destinée,
Pour jamais t'éloigner et du monde, et de moi;
Un bruit inattendu vint te frapper d'effroi;
Je supposai la mort...

Euphémie.

Sinval voit la lumière!
La Comtesse D'Orcé.
Tout m'engage du moins à le croire.

Euphémie.
ô ma mère!
Mon coeur ne suffit pas mes transports mon bonheur...
Il vit ciel, sur mes jours épuise ta rigueur...

Serrant les mains de sa mère.

Que ne vous dois-je point? Sinval Sinval respire...
Ô Dieu, qu'il soit heureux! Et que cent fois j'expire!

Après une pause.

Mais il m'aimait; comment a-t-il pu me laisser?...

La Comtesse D'Orcé.
Tu ne sais pas encor que vais-je t'annoncer?

Euphémie, rapidement.
Il cessa de m'aimer? Gardez-vous de m'instruire.

La Comtesse D'Orcé.
Sinval il t'adoroit. Faut-il donc te redire
Ce que mon coeur voudroit, ma fille, se cacher,
Ce que sans cesse, hélas! Je dois me reprocher?

Euphémie.
Parlez...

La Comtesse D'Orcé.
Quels nouveaux coups une mère te porte!
Sinval que tu crus mort, à son tour te crut morte.

Euphémie.
En est-ce assez, grand Dieu?

La Comtesse D'Orcé.
De douleur égaré,
Il fuit loin de mes yeux son sort est ignoré...

Euphémie.
Sinval ne sera plus. J'éprouve trop moi-même
Combien il est affreux de perdre ce qu'on aime.
Je n'en saurois douter; il est dans le tombeau...
Mais, pourquoi m'arrêter à ce sombre tableau?
Sinval, à mon trépas peut être moins sensible,
Aura pu soutenir cette disgrace horrible,
Se consoler quel coeur aima comme le mien?
Qu'ai-je dit? Captivé par un nouveau lien,
Peut-être dans les bras dans le sein d'une épouse...
Il manquoit à ma flamme, ô ciel, d'être jalouse!
Et d'un semblable feu je puis encor brûler!
Où m'emporte un amour qui veut tout s'immoler?
En ce moment, c'est moi, moi seule que je pleure.
Ne voyons que Sinval, qu'il vive, et que je meure!
Et n'est-il pas heureux, s'il a pu m'oublier?
Voudrois-je à mes tourmens, Sinval, t'associer?
Incertaine en mes voeux, de raison incapable,
Toujours plus malheureuse, et toujours plus coupable,
Mon coeur mon coeur ne sait, aveugle en ses transports,
S'il n'aimeroit pas mieux Sinval parmi les morts,
Que Sinval loin de moi, jouissant de la vie;
Non, je ne puis dompter l'affreuse jalousie.
Vous avez cru, à sa mère. jugez de mon égarement,
Vous avez cru m'offrir quelque soulagement,
Et vous venez encor d'irriter mes tortures;
Tous les poisons, les feux enflamment mes blessures;
Je ne me connois plus je repousse en fureur
L'autel, où j'ai formé mon éternel malheur;
J'ouvre mon sein brûlant au trait qui le déchire;
L'amour au désespoir est tout ce qui m'inspire...
Je rejette mon voile en outrageant l'époux,
En outrageant le dieu dont je crains trop les coups.
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