Le melancolique.
Sonnet 36.
Si ne pouvant forcer mon humeur volontaire
Je trouble par mes cris le silence d' un bois ;
Les oyseaux ont pitié de ma dolente voix,
Et souspirent tout haut l' ennuy que je dois taire.
Si couché sur les bords d' une onde solitaire,
Je l' entretiens des maux qu' en aimant je reçois ;
Son crystal en murmure, et bien-tost j' apperçois
Qu' elle s' égare enfin de sa course ordinaire.
Si je raconte aux fleurs ma cruelle douleur,
Je voy les fleurs pâlir, et changer de couleur ;
Ainsi pour mon sujet la nature souspire.
Que mon sort est marqué d' un estrange compas !
Tout ce qui ne peut rien, veut finir mon martyre,
Et celle qui peut tout, Cloris ne le veut pas.