Les souspirs.
Sonnet 85.
Soûpirs, tristes témoins de mon triste martyre,
Volez devers Cloris, je vous donne congé,
Faites luy voir le mal dont je suis outragé
Depuis que j' obeis aux loix de son empire.
Souspirs si vous jugez que la belle en soûpire
Et que son coeur superbe en paroisse affligé,
Assiegez son esprit, et l' ayant assiegé,
Semez-y cette ardeur que sa beauté m' inspire.
Si l' ingrate s' obstine en son peu d' amitié,
Si vous ne pouvez pas l' émouvoir à pitié,
Publiez en tous lieux sa rigueur sans seconde ;
Chacun l' évitera comme un gouffre de maux ;
Sa beauté n' aura plus d' adorateurs au monde,
Et mon ardante amour n' aura plus de rivaux.