Le laurier, et l' amant.
Sonnet 86.
Delices d' Apollon, et sa derniere flâme,
Relique de l' objet qui dédaigna ses voeux,
Prix des hommes sçavans, comme des belliqueux,
Laurier que ma main plante, et que ma voix reclame.
Depuis le jour fatal que je sers une dame,
Ton sort, et mon destin sont semblables tous deux ;
L' eau du ciel te recrée et te rend vigoureux,
L' eau de mes pleurs esgaye et soulage mon ame.
Tu cheris les rochers, j' en aime un comme toy,
Ta fleur est blanche et pure, aussi bien que ma foy ;
Ton verd est eternel, mon espoir tousjours dure ;
Ainsi que mon amour ton feüillage est sans fruit,
Ce qui nous rend pourtant de diverse nature,
Tu te plains en bruslant, et je brusle sans bruit.