ACTE 3 SCENE 3
Lénox, un principal conjuré, une partie des
conjurés ou soldats d' Edgard, Edgard,
Helmonde.
Edgard, amenant et montrant Helmonde.
Amis, voilà l' objet qui nous rassemble tous.
Dans cet antre écarté cachant son sort funeste,
Elle a pleuré Léar : le ciel a fait le reste.
Helmonde.
Mortels compatissans, daignent les justes dieux
Sur vos nobles projets fixer toujours les yeux !
Ils lisent dans mon ame abattue et flétrie ;
Ils savent si jamais les malheurs l' ont aigrie.
Mais pouvais-je oublier mon père dans les pleurs ?
Des ingrats tout-puissans sont bientôt oppresseurs.
Le ciel vous fit anglais : vous avez pris les armes.
Je n' ai pour vous aider que des voeux et des larmes.
Faites régner mon père ; hélas ! Qu' au lieu d' affront
Le bandeau de vos rois brille encor sur son front !
Qu' à ses regards sur-tout je ne sois plus coupable !
Cependant, si le ciel plus doux, plus favorable,
Ne vous eût pas courbés sous un sceptre odieux,
Sans meurtres, sans combats, combien j' eusse aimé mieux,
Dans ces forêts cachée, heureuse en ma misère,
En montrant la caverne.
Offrir cet humble asile à mon vertueux père,
Consoler sa vieillesse, et, par de tendres pleurs,
Lui faire, entre mes bras, oublier ses malheurs !
Edgard.
Reconnaissez Helmonde à ce noble langage.
Mais, madame, il est temps d' accepter notre hommage.
En mettant la main sur la garde de son épée.
Par ce fer, le premier, je jure à vos genoux...
Les éclairs brillent, et le tonnerre gronde.
Le Principal Conjuré.
Ciel ! Quel bruit ! Quels éclairs ! Grands dieux, qu' annoncez-vous ?
Lénox.
Est-ce un présage heureux ? Que faut-il que je pense ?
Edgard.
C' est le ciel qui s' apprête à venger l' innocence.
Jurez tous par Léar de le proclamer roi,
De mourir pour Helmonde, ou de vaincre avec moi.
Il tire son épée.
Le Principal Conjuré, tirant aussi son épée :
tous les autres l' imitent.
Nous le jurons.
Amis, la nuit sera terrible :
Ce ciel sombre et vengeur, armé d' un feu visible,
Va d' un affreux tonnerre effrayer les humains.
Un autre aussi rapide est caché dans nos mains :
C' est ce fer ; et marchons ; mais, dans notre furie,
N' étendons point nos coups sur le duc d' Albanie ;
Respectons ses vertus.
Aux conjurés, en montrant Lénox.
amis, suivez ses pas :
Le poste est important. Je ne tarderai pas
À rejoindre avec vous tout mon camp qui s' assemble ;
Et nous irons après vaincre ou mourir ensemble.
Lénox sort avec tous les conjurés.