Les pins de Nicolet
Ô mes vieux pins touffus, dont le tronc séculaire
Se dresse défiant le temps qui détruit tout,
Et, le front foudroyé d'un éclat de tonnerre,
Indomptable géant, reste toujours debout!
J'aime vos longs rameaux étendus sur la plaine,
Harmonieux séjours, palais aériens,
Où les brises du soir semblent à chaque haleine,
Caresser des milliers de luths éoliens.
J'aime vos troncs noueux, votre tête qui ploie,
Quand le sombre ouragan vous prend par les cheveux,
Votre cîme où se cache un nid d'oiseau de proie,
Vos sourds rugissements, vos sons mystérieux!
Un soir, il m'en souvient, distrait, foulant la mousse
Qui tapisse en rampant vos gigantesques pieds,
J'entendis une voix fraîche, enivrante, douce,
Ainsi qu'un chant d'oiseau qui monte des halliers.
Et j'écoutais rêveur... et la note vibrante
Disait: « Ever of Thee!... » C'était un soir de mai...
La nature était belle, et la brise odorante...
Tout ainsi que la voix disait: aime!... et j'aimai!
Ô mes vieux pins géants, dans vos concerts sublimes,
J'ai souvent retrouvé ce divin chant d'amour
Qui résonne toujours dans mes rêves intimes,
Et votre souvenir dore mon plus beau jour.
Puissé-je un soir encor, sous vos sombres ombrages,
Rêver en écoutant vos soupirs amoureux,
Ou vos longues clameurs quand l'aile des orages
Vous secoue en tordant vos bras majestueux!
Malheur à qui prendra la hache sacrilège
Pour mutiler vos flancs par de sanglants affronts!...
Mais non! ô mes vieux pins! le respect vous protège,
Et des siècles encor passeront sur vos fronts!