AMOURETTES SONNET
Au mois qu' amour est le plus en vigueur,
Madame et moy dans un espais boccage
Favorisez d' un agreable ombrage
Goustions les fruicts d' amoureuse langueur.
Elle s' endort en ce plaisir charmeur
Et moy saisi d' une gentille rage
Sans l' éveiller baisottois son visage
Et fy ces vers sur son oeil ravisseur.
Flambeau d' amour, foudroyante lumiere,
Si au travers de ta blanche paupiere
Tu vais lançant tant d' esclairs radieux:
Qui peut souffrir ta clarté toute nuë?
Bel oeil, tu semble à ce grand oeil des cieux
Qu' on n' oze voir qu' au travers d' une nuë.
Ma belle un jour dessus son lict j' approche
Qui me baisant ja soubs moy fretilloit,
Et de ses bras mon col entortilloit
Comme un lierre une panchante roche.
Au fort de l' aize, et la pasmoison proche
Il me sembla que son oeil se fermoit,
Qu' elle estoit froide, et qu' elle s' endormoit
Dont courroucé je luy fis ce reproche.
Vous dormez donc? Quoy! Madame, estes vous
Si peu sensible à des plaisirs si doux?
Lors me jettant une oeillade lascive.
Elle me dit: non non mon cher desir
Je ne dors pas, mais j' ay si grand plaisir
Que je ne sçay si je suis morte ou vive.