L' amour volé.
Sonnet 16.
L' autre jour ma Cloris, cette jeune bergere,
Qui captive mon ame, et m' impose des loix,
Trouva l' amour couché dedans le sein d' un bois,
Qui goustoit le sommeil sur la verte fougere.
Là suivant le dessein qu' un démon luy suggere,
Elle luy déroba ses aisles, son carquois ;
Et préferant sa proye aux richesses des rois,
Elle quitta ce lieu d' une course legere.
Depuis ce jour funeste on ne void point de coeurs
Dont ses superbes traits ne demeurent vainqueurs ;
Pour moy j' en porte au sein des marques eternelles.
Mais tout ce qui m' afflige en luy faisant la cour ;
C' est que m' ayant blessé des flesches de l' amour,
La cruelle me fuit à l' aide de ses aisles.