L' amour absolu.
Sonnet 91.
D' où vient, belle Cloris, quand je suis pres de vous,
Pour donner un peu d' air à ma flâme secrette,
Que le dieu des beaux vers rend ma muse muette,
Comme si mon brasier allumoit son courroux ?
Mais quand loin de vos yeux dont l' objet m' est si doux,
Je soûpire ardamment le bien que je souhaitte,
Je produis tant de vers qu' il n' est point de poëte
Qui de ma noble ardeur ne devienne jaloux.
Mais sans avoir recours aux raisons de la fable,
J' en découvre, ô Cloris, la raison veritable,
Qui vous rend éclairée, et me rend éclaircy ;
C' est que comme Apollon, ce grand dieu de lumiere,
. . . . . . . . . . . . .veut l'ame toute entiere,
Amour est un grand dieu qui la veut toute aussy.