L' amour incurable.
Sonnet 22.
Prophanes enchanteurs, éloignez-vous d' icy ;
Vos herbes, ny vos jus, vos billets, ny vos charmes,
Ne sçauroient moderer l' excés de mon soucy,
Ny tarir seulement la moindre de mes larmes.
Il faut bien contre amour de plus puissantes armes ;
Amour n' est pas un dieu que l' on surmonte ainsi ;
Il triomphe de Mars au milieu des alarmes,
Et comme il sçait blesser, il sçait guerir aussi.
Puissante deïté qui m' as l' ame asservie,
Puis que de toy dépend et ma mort, et ma vie,
Vole au sein de Cloris, pour eschauffer son coeur.
Comme elle a du soleil la lumiere féconde,
Fay que ce beau soleil ne soit pas sans chaleur,
Et qu' elle sente un peu ce qu' elle donne au monde.