L'amant, et le chasseur.
Sonnet 38.
Cependant que les champs t' exercent à la chasse,
La ville me retient aupres de mes amours ;
Tu parles à des bois, je me plains à des sourds,
Je t' estime cruel, tu me crois pleins d' audace.
Tu suis tousjours un cerf qui fuit devant ta face,
Je poursuis la beauté qui s' escoule tousjours ;
Tu tends mille filets, je fais mille discours ;
Et ton art, et le mien, souvent nous embarasse.
Tous deux nous méprisons et la pluye, et le vent ;
Tu meines des limiers qui te vont décevant,
Et l' espoir m' entretient d' une trompeuse joye.
En un poinct, Lisidor, nous diferons pourtant ;
Tu triomphes tousjours en terrassant ta proye,
Et moy je suis vaincu quand j' en ay fait autant.