La cruelle.
Sonnet 92
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Junon pour son pouvoir eut le nom de deesse,
Diane le receut pour sa pudicité,
Venus le merita pour sa rare beauté,
Pallas pour le sçavoir dont elle fut maistresse.
La force, la pudeur, la beauté, la sagesse,
Esclattent plus en toy qu' elles n' ont esclatté ;
Et tu n' es pas pourtant une divinité,
Comme ces grands objets du culte de la Gréce.
Mais, Cloris, en cela ne te plains que de toy,
Car encore que tout vive, ou meure sous ta loy,
Que tu sçaches dompter l' ame la plus rebelle ;
Que de corps et d' esprit tu sois riche d' attraits,
Je ne te flatte point, tu nous es trop cruelle,
Et les divinitez ne le furent jamais.