L' amour funeste.
Sonnet.
Si-tost que vous aimez un sujet qui vous aime,
Vostre amour, dites-vous, est funeste pour luy ;
Tesmoin ce frere mort, tesmoin ce grand appuy
Qui perdant la raison, vit, et n' est plus luy-mesme.
C' est d' un astre fatal l' influence supresme,
Qui cause ce desordre et cause vostre ennuy ;
Loin de contribuer aux disgraces d' autruy
Quand vous plaignez son mal, son mal n' est plus extresme.
Ce pretexte peut-il vous divertir d' aimer ?
De moy quand vostre amour me devroit consumer,
Je m' oubliray moy-mesme avant que je l' oublie ;
Et loin d' apprehender les disgraces du sort,
J' aimeray dans l' excez, et jusqu' à la folie,
Puis que je prouveray mon amour par ma mort.